Brigades Rouges


Toni Negri

Paolo Persichetti

Cesare Battisti

 

Un Vautrin contemporain

Merci à Jacques de Guénin de m’avoir envoyé ce roman en un feuillet de Véronique Maurus, paru dans Le Monde du 16 septembre 2002. Dans un style balzacien, Vautrin revit un instant toutes ses ambiguïtés mais sous une lumière plus chaleureuse puisque c’est lui le héros romantique. Un homme intemporel, séduisant sans le vouloir et riche d’un passé énigmatique. Vautrin illumine une petite rue de Rome, il ne fait que passer mais la journaliste ne voit que lui, le reste est décrépitude, gens pressés, futiles, bavards, des italiens quoi ! -, pourrait-elle dire.

Vautrin aussi est transalpin, mais il possède cette retenue, cette austérité qui tranche tellement sur ses compatriotes. D’ailleurs, ces italiens là, ils ne l’aiment pas, ils le prennent pour le diable. Nul n’est prophète en son pays semble-t-elle regretter. Car ailleurs, avance-t-elle, cet homme est un théologien, un pape que l’on vient consulter du monde entier.

Le sujet magnifié intrigue, il passionne, quelque chose se passe entre la créature de chair et de sang et celle qui le décrit. Elle insiste sur ses compagnes nouvelles qu’il trouve à chaque exil – serait ce bien Vautrin ? -, elle exhibe  sa fragilité avec une crise sentimentale qu’elle évoque et les deux dépressions qu’a vécu ce monstre de romantisme là. Ce n’est pas l’homme tel qu’il est, c’est le reflet d’un fantasme, d’une fascination pour une violence meurtrière et fanatique.

Le charme vient justement de la monstruosité, de cette fascination nauséabonde qui relègue la journaliste aveuglée au rang de l’ignoble : « on comprend que cet homme a souffert, dans son orgueil mais aussi dans sa chair, que, s’il est encore debout, s’il n’a jamais lâché malgré des épreuves qui rempliraient un roman, s’il renaît de ses cendres, c’est au prix d’une foi et d’un courage rares, un courage désespéré qui force l’admiration, … »

Vautrin a commis bien des crimes d’innocents, il s’en repent et souhaite profiter de l’entregent que son passé lui a procuré afin de se racheter par le service des méritants. Mais la comparaison s’arrête là, l’homme n’est pas Vautrin, il ne regrette rien, il évoque une partie de ses exploits avec cynisme sans en revendiquer l’intégralité. Qu’on lui parle de tout ce mal qu’on lui reproche et le voilà qu’il rit, les meurtres il en rit, et puis tout cela est « purement accidentel ». Le président italien l’avait traité de cynique répugnant, il en fait une affichette épinglée à son mur et … il rit. Non seulement il n’a pas de regrets mais il déteste les repentis, il traîne dans la boue ses anciens compagnons qui ont eu le tort de se faire rattraper par leur conscience. La mauvaise conscience ne paie pas, alors que l’étalage de la monstruosité fascinante captive, séduit et donc rapporte.

La fascination du mal

Ce Vautrin avorté, ce monstre sans rédemption s’appelle Toni Negri, à son palmarès le leadership présumé des brigades rouges avec au moins un hold-up. Le reste : enlèvements, meurtre d’Aldo Moro et de biens d’autres, mais surtout l’incitation aux troubles et aux assassinats du haut de sa chaire universitaire qui lui a valu le surnom d’il cattivo maestro (le mauvais maître). Une génération d’étudiants à l’origine des « années de plomb », formés par la maestro Negri, des étudiants repentis, gâchés, évidemment pleins de rancune. Negri les méprise pour leur revirement alors qu’une plus jeune génération en partie formée dans sa nouvelle université de Paris 8 l’admire, l’idolâtre comme dirait notre journaliste. La France l’a accueilli dans sa fuite aussi longtemps qu’il l’a souhaité.  L’Europe de la justice a pâti de l’exception Mitterrand pour les brigades rouges, Danielle devait l’adorer, et lui Negri se sentait si bien  dans ce pays : « En France, il n’y a pas de haine politique ». On en jugera dans les 15 jours qui suivent le 21 avril 2002 … Mais c’est vrai qu’ici on trouve des militants d’ATTAC pour proclamer : « c’est l’un des plus importants penseurs en vie actuellement ». Oui sa monstruosité rapporte quand il la théorise en arme contre le libéralisme, son livre « Empire » , « est devenu la bible de tous les mouvements alternatifs, de Seattle à Porto Allegre », nous dit la journaliste du Monde. Plus de 100 000 exemplaires vendus et la suite est en cours d’édition ! Depuis, il a renouvelé ses contacts politiques, décidé à ne plus faire l’erreur d’une mauvaise stratégie pour l’organisation d’une force politique, persuadé que l’on ne devient terroriste que si on nous pousse à le devenir. La fin décidera donc de cette nécessité, et puis dans ses délires, il sort une autobiographie de son existence de salope sous forme d’entretien avec une psy tombée sous le charme.

Ah oui quel charme, reprenons ce roman au pays où la haine politique n’existe pas, imaginons que le portrait tracé soit celui d’un Libertarien, forcément trop pur et innocent. Ni Negri ni Guevara donc, cela donnerait :

« Au détour de la plus belle avenue du monde, la rue Balzac s’anime doucement. En cette chaude matinée, les cafetiers sortent tables, chaises, parasols, les premiers badauds croisent les employés de bureau et se sourient machinalement au passage. Un homme descend la rue d’un pas rapide, le regard figé, dur. Dans sa hâte on devine le souci d’un temps trop rare dont il se réserve l’exclusivité jalouse. Seul, il a cet air arrogant, cette laideur de celui pour qui rien ne compte, si ce n’est peut être le cours de ses actions. »

Xavier COLLET, le 12 janvier 2003

 

En finir avec les Brigades Rouges et la complicité de l'Etat Français

Qui ose prétendre que Paolo Persichetti se soit définitivement retiré de la lutte armée ?

Certainement pas les responsables italiens de la lutte contre le terrorisme, lesquels enquêtent actuellement sur une vague de meurtres revendiqués par les « nouvelles Brigades Rouges ».

L’assassinat du professeur Marco Biaggi en début d’année 2003 était suivi avec passion par certains anciens de la mouvance terroriste protégés par les politiques français, que ce soit Cesare Battisti ou Paolo Persichetti. Ce dernier participait à une discussion animée sur une liste Internet en donnant des arguments foireux à des exécutions politiques. Persichetti n’avait jamais démenti son intérêt pour la justification de la violence gauchiste, notion qu’il a continuer à  propager jusqu’au bout en tant que professeur à Paris 8. Il gardait des contacts avec des « brigadistes » en activité tels que Nicola Bortone incarcéré en Suisse pour le meurtre du professeur Massimo d’Antona en 1999.

Il semblerait donc, selon les enquêteurs italiens, que la reconstitution des brigades rouges ait en partie été insufflée par les «réfugiés politiques» accueillis bras ouverts par le régime Mitterrand. Ceux-ci se comptent aujourd’hui en France au nombre de 140 à 200 «anciens combattants des années de plomb», tous possédant une couverture de notables, reconvertis dans leur grande majorité dans la propagation d’idée (journalistes, éditeurs, enseignants). Plus encore que les autres, Paolo Persichetti a nourri au moins intellectuellement, la nouvelle vague de terroristes qui ont frappé en trois ans deux conseillers économiques du ministre du Travail. Ce qui fait dire à un des enquêteurs italiens que «la direction stratégique des nouvelles Brigades Rouges pourrait bien se trouver dans la Ville lumière».

Xavier COLLET, le 20 juin 2004

 

Immondes consciences

Cesare Battisti, ancien des brigades rouges s’est rendu coupable d’une soixantaine de braquages et a, au passage, froidement expédié ad patres quatre de ses victimes dans l’Italie des années de plomb. Le premier, gardien de prison de son état succomba à une volée de balles dans le dos ; le deuxième, commerçant tentant de résister à un hold-up, fut liquidé à terre de deux balles bien placées ; même scénario meurtrier pour le troisième dont en outre le fils est resté paraplégique par l’entremise d’une balle supplémentaire ; enfin le quatrième est un policier « exécuté » car Battisti avait pu voir à la télévision qu’il enquêtait sur les assassinats de sa bande.

L’enflure participait par ses hauts faits à une volonté délibérée de créer un climat de terreur à la fin des années 70 dans l’objectif d’une prise de pouvoir communiste. Peine et sang perdu, avant de renaître de ses cendres en commettant de nouveaux attentats depuis 1999, l’organisation terroriste fut laminée et ses tueurs jugés dont une bonne partie par contumace. Entre temps, après avoir senti le vent tourner, une nombreuse partie de ces ordures a trouvé refuge en France. La France des Mitterrand et autres Chirac, paradis des gauchistes où le plus crétin des tueurs marxistes est toujours assuré d’un poste d’enseignement à Paris 8 ou d’artiste consacré par ses pairs babas d’admiration pour ceux qui commirent leur plus grand fantasme d’exécuteur guévariste.

La demande d’extradition de ces salopes tarda, mais le gouvernement Berlusconi pris les choses en main et insista pour que les tueurs purgent leur peine.

La prise en considération de cette demande par le garde des Sceaux remue le paysage médiatico-politique français depuis maintenant deux ans. Tout ce que ce pays compte de fange et de faux talents se révèle à l’occasion de pétitions obscènes lancéeS par l’appareil du SNESUP (syndicat des enseignants du supérieur) par des comités ad hoc dans lesquels trônent les immondes consciences d’attac, du PCF, de l’UNEF, du SNES. Pétitions signées par une grande partie des enseignants de Paris 8, par Cohn-Bendit, Alain Lipietz, Noël Mamère, Pierre Vidal-Naquet. On y trouve aussi Gérard Filoche, chef des inspecteurs du travail à l’indignation sélective, dont le dernier bouquin peut nous laisser penser que si les BR se recyclaient dans l’exécution de ses congénères, le retour du pal serait bienvenue. Not last but not least, l’énumération serait fastidieuse, le poignardé de l’hôtel de ville en a aussi fait un citoyen d’honneur de la ville de Paris et l’écrivaine ratée Fred Vargas a pris le rouge oriflamme de la défense d’un Battisti en cavale à travers un bouquin remplis d’arguments lamentables.

Mais revenons un moment sur l’inanité flagrante des motifs  invoqués pour la défense de l’enflure Battisti.

1.      Parole donnée par la France de non-extradition des membres des brigades rouges réfugiés.

Si la France a une parole alors qu’on me montre la France.  La parole en question est celle de Mitterrand, cette promesse constitue en réalité une obstruction flagrante à une mesure de justice, elle est un fait du prince, une preuve du non-respect de l’Etat de droit. Il est symptomatique que cette promesse n’ait pas donné lieu à une levée de bouclier, s’emparant d’une prérogative monarchique Mitterrand s’était rendu coupable d’abus de pouvoir et de forfaiture. A ce titre, il aurait dû être traduit en justice, à défaut de cela il appartenait à n’importe qui de livrer les terroristes à leur juge ou aux ayant-droits des victimes d’exercer leur justice puisque l’Etat italien n’était plus en mesure de le faire. Le chef d’accusation d’enlèvement ou de meurtre qui n’aurait pas manqué d’être émis par la justice française nous démontre bien que la promesse de Mitterrand est un triomphe de l’injustice. On ne peut donc  justifier par son caractère injuste que perdure une mesure contraire à la justice. Ceux qui se hasarderait à un tel argument se rendent donc coupables de crime de complicité.

2.      L’Italie des années de plomb était dominée par les fascistes.

C’est là un argument typique de l’extrême gauche. En réalité les autorités italiennes étaient tentées par la négociation, la main tendue par le démocrate-chrétien Aldo Moro aux communistes explique d’ailleurs sa fin terrible entre les griffes des brigadistes. Il est utile de rappeler aussi que le PCI considérait les désordres brigadistes comme des actes de crapulerie et que le maire PCI de Bologne envoya les chars pour faire cesser les troubles insurrectionnels dans la ville. Maintenant le terme fasciste ne veut pas dire grand-chose, si toute résistance contre l’extrême gauche est fasciste j’aimerai moi-même être considéré comme le plus grand fasciste de tous les temps.

3.      Le procès Battisti n’était pas juste.

Encore une connerie, Battisti a été jugé en 1989 par contumace, son avocat a fait appel et il fut rejugé en 1990. Un jugement on ne peut plus équitable puisque la Cour européenne des droits de l’homme le valida.

4.      Il faut considérer les faits comme prescrits, Battisti a prouvé sa capacité de réinsertion.

Vraiment ? « Disons que j'assume mes responsabilités politiques et militaires de ce que furent les années '70 en Italie. Cela dit, il est clair que je n'ai pas de pardon à demander à un gouvernement qui a ramené le fascisme au pouvoir un demi-siècle après Mussolini. Mais, au contraire de Sofri, je plaide coupable et j'en suis fier. » Sans commentaire. Ah si l’enflure n’a pas attendu la confirmation de l’arrêté d’extradition pour se faire la belle, comme quoi avec des ordures pareilles la seule justice qui passe est la plus expéditive.

 

Xavier COLLET, 2 décembre 2004