La Bureaucratie
Dès 1939,
l'alternative socialisme ou capitalisme est remise en question par plusieurs
auteurs de différentes « sensibilités marxistes ». L'ex-trotskiste italien
Bruno Rizzi publie La bureaucratisation du monde. La même année, le
luxembourgiste Lucien Laurat étudie dans Le Marxisme en faillite Un phénomène nouveau
qu'il baptise techno-bureaucratie. Puis en 1940
l'ex-trotskiste James Burnham, dans un livre retentissant, L'Ere des
organisateurs, montre que le capitalisme n'est pas remplacé par le socialisme
mais par une « société directoriale ». Cette thèse sera reprise en détail par
l'ex-communiste Yougoslave, Milovan Djilas, dans son livre La Nouvelle Classe
Dirigeante.
Mais pour intéressantes que soient ces analyses, il y manquait le point de vue
des économistes.
C'est à cette tâche que s'attèleront deux d'entre eux : le professeur Ludwig von
Mises et son disciple et ami Friedrich von Hayek. Le premier publiera La
Bureaucratie (1944) et le second la fameuse Route de la servitude (PUF/Quadrige
1944), toujours rééditée.
Soixante ans après
sa publication, le livre de von Mises n'a pas vielli. Au contraire, son
actualité se révèle presque à chaque page. Le collectivisme ne fonctionne pas
(quelle que soit la date ou le lieu de son « installation ») certes ; mais il
faut en comprendre la cause. Pour Mises le collectivisme n'est
pas atteint d'un vice mineur, arrangeable ou rectifiable. Au contraire, ce
système ne peut pas fonctionner parce qu'il lui manque le caractère essentiel de
la rationalité économique. Ce ne sont pas les six dernières décennies écoulées
qui contrediront ce jugement. Mais pour rétablir le plein emploi et la
prospérité pour tous la stabilisation monétaire et le libre échange
international ne sont pas suffisants. Il faut une compréhension en profondeur
des phénomènes économiques.
« L'évolution
actuelle, écrivait von Mises en 1944, qui tend à l'omnipotence de l'Etat et au
régime totalitaire aurait été immédiatement arrêtée si ses partisans n'avaient
pas réussi à endoctriner la jeunesse et à la détourner de l'étude de la science
économique.
La science économique est une science abstraite qui, par conséquent, n'enseigne
pas à l'homme comment classer les valeurs, ni vers quels buts il doit tendre.
Elle ne pose pas de fins suprêmes. Car ce n'est pas là le rôle du penseur, mais
celui de l'homme d'action. La science est un produit de la
pensée, l'action un produit de la volonté. En ce sens, on peut parler de la
neutralité de l'économie politique en tant que science en face du problème des
fins ultimes de l'action humaine.
Mais il en est autrement des moyens à appliquer pour atteindre des buts sociaux
donnés. Dans ce domaine, la science économique est pour l'action le seul guide
sûr. Si les hommes veulent atteindre les buts sociaux qu'ils poursuivent, il
leur faut conformer leur conduite aux enseignements de la
pensée économique. »
Ce qui était vrai alors, l'est encore plus aujourd'hui.
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Essai sur les limites de l'action de l'Etat
Guillaume de Humboldt est connu pour avoir laissé son nom à l’université de Berlin, mais c’est aussi un sociologue qui s’intéresse à l’individu et à ses rapports avec l’Etat. Après de nombreuses considérations il en vient à exalter l’individualité de l’humain qui s’exprime le mieux par l’exercice des libertés individuelles. C’est au cours de cet exercice que chacun peut exprimer sa singularité et son potentiel maximal.
L’intervention de l’Etat, même si on suppose la plus grande vertu et le plus grand désintéressement des hommes de l’Etat, supposition gratuite au possible on en conviendra, ne peut avoir que des effets néfastes sur l’individu. Humboldt n’admettra que la garantie étatique des droits naturels, pour le reste l’éducation publique, l’assistance, ne mène qu’à l’uniformisation, la robotisation de l’humain. L’État d’aujourd’hui ne peut donc que secréter ce qu’il y a de plus médiocre en l’homme, il ne permet pas à sa grandeur de s’exprimer, tueur de singularité l’Etat affaiblit aussi l’homme qui se drogue à son assistance et n’est plus capable de compter sur ses propres forces.
Dommage que la lecture de l’ouvrage se révèle si fastidieuse, il est vrai que le style est marqué de redondances et que l’on est bien content d’arriver à la dernière page.