Une manif pour défendre le capitalisme


Le Figaro du samedi 1er décembre 2001, n° 17 826, page 1

 

Ce dimanche, à 14 heures, grande manif populaire, place de la Bastille, à Paris. Les organisateurs appellent les "ouvriers, étudiants, cadres, artistes, enseignants" à s'y rendre en masse. L'air est aussi connu que le parcours où des générations de pèlerins de la gauche singulière et plurielle ont usé leurs semelles en même temps que leurs voix.

Mais celle-ci est particulière. C'est même une grande première : il s'agit d'une marche pour la défense ... du capitalisme ! Il est vrai que le champ est libre puisque les manifestations en faveur du socialisme sont rares.

On y célébrera "la liberté d'entreprise, la propriété privée, la créativité et la recherche du bonheur". Cela paraît tellement inouï que l'on pense à un canular. Nullement ! C'est un collectif international qui lance cette marche dans quatre-vingt-douze villes du monde : New York, Moscou, Göteborg, Oslo, Hongkong, Melbourne, etc.

C'est précisément de Melbourne que l'idée a été lancée, non par un capitaine d'industrie mais par un chanteur des rues, Prodos, en juillet. L'attentat contre le World Trade Center a été le coup de fouet. Il explique : "il est temps pour le monde de faire un choix entre les principes positifs et constructifs du capitalisme, ces principes qui ont érigé le World Trade Center, et d'autres principes qui ont animé sa destruction et le ravage de vies innocentes."

Au cours de la marche sera distribuée la déclaration du philosophe américain Andrew Bernstein : "Les plus grandes inventions, les créations artistiques majeures, les avancées philosophiques et spirituelles, de la machine à vapeur au cinéma, du roman à Internet, en passant par les grandes découvertes médicales, les idées et les inventions sont toutes l'œuvre de la liberté créatrice que permet le capitalisme. Plus une culture est capitaliste, plus grande est la prospérité et la liberté dont jouit le peuple." Les chaisières de la gauche socialiste dans leurs sacristies vont être suffoquées par tant d'audace blasphématoire.

Le coordinateur de la marche parisienne, Xavier Collet, la place sous le signe de la reconquête de nos libertés : "Nous avons cru être libres et pensions que l'État protégeait notre vie et nos biens, nous constatons qu'il n'en est rien dans une France où la moitié des richesses est socialisée et où les délinquants font la loi."

Suggérons-leur quelques slogans : "Le socialisme ne passera pas par moi !" ; "Le capitalisme pour des lendemains qui chantent !" ; "Halte à l'exploitation de l'homme par l'homme socialiste !".

D'autres actions sont prévues. La meilleure initiative capitaliste se verra récompensée dans les villes participantes. Une journée annuelle sera instaurée pour célébrer le capitalisme. Ce n'est qu'un début, le collectif continue le combat.

 

Guy BARET, le Figaro