Savez vous vraiment ce qu'est le libéralisme ?
La plupart des hommes politiques sont plus prompts à nous forcer à entrer dans le système qu'ils préconisent, à coup de lois et de règlements, plutôt que nous laisser vivre comme nous l'entendons.
Entre parenthèses, cela reflète
de leur part un mépris certain pour l'individu, puisqu'ils ne le croient pas capable de se conduire honnêtement et solidairement s'il ne rentre pas dans leur système. Or c'est évidemment le contraire qui
se produit. L 'individu ne recherche plus la vertu lorsqu'il lui suffit d'appliquer les règlements pour se donner bonne conscience, et il ne ressent
plus le besoin d'être solidaire lorsque l'État l'est à sa place.
Dans notre pays, la pensée libérale est ancienne et profonde. Elle a été illustrée par une pléiade d'écrivains prestigieux, parmi lesquels on peut citer : La Boëtie, Montaigne, Montesquieu, Voltaire, Diderot, Turgot, Condorcet, Benjamin Constant, Jean-Baptiste Say, Frédéric Bastiat, Victor Hugo, Alexis de Tocqueville, Gustave de Molinari, Jacques Rueff, Bertrand de Jouvenel, Raymond Aron, Jean-François Revel.
Le libéralisme c'est d'abord une morale individuelle, ensuite une philosophie de la vie en société dérivée de cette morale, enfin seulement, une doctrine économique qui se déduit logiquement de cette morale et de cette philosophie.
Cette morale repose sur deux concepts-clés :
- La responsabilité individuelle : être responsable, cela veut dire assumer soi-même les conséquences de ses propres actes. C'est un principe d'apprentissage par tâtonnement et d'auto perfectionnement.
- La liberté individuelle : la liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas a autrui; ainsi l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la Société la jouissance de ces mêmes droits. (Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Article 4).
Contrairement au libertaire ou au libertin, le libéral a une forte morale individuelle qui lui fait rechercher autant la liberté des autres que la sienne propre.
Les concepts de liberté et de responsabilité ne sont pas indépendants l'un de l'autre. Aucun des deux ne peut exister sans l'autre. En effet, on ne peut être responsable de ses actes que si on est libre de les commettre ou non. Réciproquement, si l'on veut respecter la liberté des autres, il faut assumer soi-même les conséquences de ses actes.
Ces deux concepts ne sont pas plus arbitraires. Ils se déduisent d'un principe universel qui est celui du maintien de la vie et de la recherche du bonheur.
Toutes les fonctions de tous les êtres vivants, du plus simple au plus complexe, n'ont qu'un objectif : maintenir leur vie. On peut donc dire que tout ce qui la maintien est bon, et que tout ce qui la menace est mauvais.
Un être vivant doit se procurer l'énergie ou la nourriture dont il a besoin pour vivre et se propager, et se protéger des menaces extérieures. Il doit réagir aux conditions extérieures - comme le chaud et le froid- , ou aux agressions, par des actions. Chez les plantes et les animaux inférieurs, ces actions sont entièrement automatiques et inconscientes. Chez I'homme, les choses sont un peu plus compliquées :
L'homme a un cerveau développé qui lui permet :
- de concevoir des objectifs, et pour les atteindre,
- de lancer des actions dont les résultats vont augmenter ou diminuer sa satisfaction. Ces actions s'obtiennent au prix d'un EFFORT
- de mémoriser le résultat de ces actions
- d'analyser ces résultats et de tirer des conclusions sur la façon de les améliorer.
Cette faculté décisive s'appelle LA RAlSON.
On voit tout de suite que grâce a ses efforts, et à l'utilisation de sa raison, l'homme peut progresser indéfiniment vers la recherche du bonheur, mais à deux conditions :
- Qu'il soit libre de ses actions.
- Qu'il en assume les conséquences.
S'il jouit de la liberté, l'homme peut créer, inventer de nouvelles voies.
S'il
en assume les conséquences, il peut tirer parti de ses erreurs pour
progresser.
Nous retrouvons ainsi les deux principes-clefs de la pensée libérale : la Liberté et la Responsabilité.
Voyons
maintenant quelles conséquences on peut tirer de ces deux principes :
1. Pour assurer sa vie, l'homme doit produire des biens qu'il pourra consommer, stocker, ou échanger, et des services qu'il pourra échanger contre d'autres biens ou services. Celui qui n'a pas droit au produit de ses efforts n'a pas la certitude de pouvoir entretenir sa vie de la façon qu'il le désire. L'homme qui produit alors que d'autres disposent de ce qu'il produit est un esclave. La propriété acquise par l'effort et la raison est donc une condition impérative de l'exercice de la liberté.
Celui qui produit et
échange gagne
Réciproquement, la
propriété acquise par la force, le vol, ou la
2. L'homme produit au prix d'un
effort, en utilisant sa raison. Il obtiendra des résultats d'autant meilleurs qu'il
fera plus d'efforts et utilisera mieux sa raison. C'est la
Le corollaire est que la morale
libérale ne tolère pas l'inégalité
Nous allons voir maintenant que l'existence de la société améliore considérablement l'efficacité de l'individu dans sa recherche du bonheur par l'effort et la raison, et que réciproquement, la recherche individuelle du bonheur par l'effort et la raison engendre des conséquences extrêmement positives pour la société.
D'abord,
la comparaison de ses résultats avec ceux des autres permet de progresser -
à condition que le jugement ne soit pas altéré par l'envie. Ainsi la recherche
de l'efficacité fait progresser la morale.
Ensuite, s'il jouit de la liberté, l'homme peut créer, inventer de nouvelles voies. Ce faisant, il enrichira aussi les autres. L'homme qui fournit seulement un travail physique consomme à peu de choses près l'équivalent de la valeur qu'il produit. L'homme qui produit une idée, une invention, ne reçoit qu'une infime partie de la valeur qu'il a ajoutée au patrimoine de l'humanité, et dont un nombre illimité de personnes bénéficiera.
Enfin, I'individu peut obtenir les biens ou les services qu'il ne peut ou ne veut produire lui-même, grâce à l'échange, sanctionné par un contrat si l'échange s'accomplit dans la durée. Lorsque l'échange est libre, les deux parties y trouvent leur satisfaction et aucun tiers n'est lésé.
Les
échanges favorisent les rapports pacifiques entre les hommes et contribuent
à la moralisation de ces rapports. Pour que les échanges soient efficaces, ils doivent exclure le
mensonge. Les échanges au sein de sociétés un peu complexes exigent donc la confiance.
Ainsi,
si aucune autorité n'intervient pour lui dicter ses choix, l'homme peut
choisir le travail qu'il préfère, se spécialiser dans ce travail, et aller
aussi loin dans la voie du succès que sa volonté et son talent le permettent,
sous la réserve importante que ce travail ait un intérêt pour d'autres.
Lorsque
les hommes sont libres de leurs échanges, c'est le meilleur produit et le meilleur jugement qui
l'emportent dans tous les domaines de l'action humaine,
qui élèvent continûment les niveaux de vie et de pensée de tous ceux qui y
participent.
Contrairement aux anciens rois et seigneurs féodaux, aux modernes dictateurs, et même aux représentants de nos gouvernements, le chef d'entreprise n'obtient rien par la force: il sert autrui. Il doit satisfaire ses clients, et il perd tout pouvoir dès qu'il n'est plus en mesure d'assurer de meilleurs services que ses concurrents. La plus grosse entreprise perd sa puissance et son influence dès qu'elle perd ses clients.
Le profit va seulement a celui qui a compris ce que veulent les autres. Il n'en est pas de même pour les activités de l'État, qui ne connaissent aucune sanction.
Est-ce
a dire que le libéral n'agit que par intérêt personnel ? Nullement, mais pour
lui, la sollicitude vis a vis de
ses semblables, la solidarité, sont des vertus individuelles qui s'exercent
directement ou au moyen de libres associations. Il ne considère pas comme
solidarité le fait de faire redistribuer par l'État l'argent pris à d'autres.
Pour satisfaire des objectifs qui dépassent ses seules capacités, l'individu s'associe librement à d'autres individus pour constituer des associations ou des sociétés. Ces groupements peuvent à leur tour s'associer pour accomplir des objectifs encore plus ambitieux. Mais les groupes d'ordre supérieur ne doivent pas retirer aux groupes d'ordre inférieur (dont le plus petit est l'individu), ce que ces derniers peuvent accomplir eux-mêmes : c'est le fameux principe de subsidiarité
Pour le libéral, l'État lui-même devrait être une association d'ordre supérieur à laquelle les associations d'ordre inférieur délégueraient certains pouvoirs et certains moyens, selon le principe de subsidiarité. Mais nous vivons depuis toujours dans un schéma strictement inverse où l'État dispose de tous les pouvoirs et ne consent à déléguer quelques petits espaces de liberté aux citoyens que lorsque ceux-ci le lui arrachent.
L'État
est le plus grand danger
Année
après année, les rapports
A
défaut de pouvoir reconstruire les institutions sous le principe de
subsidiarité, les libéraux s'efforcent de
limiter le pouvoir des États. C'est eux qui ont inventé le principe de séparation des pouvoirs, si
difficile à mettre en oeuvre, même dans notre
vieille démocratie. C'est eux
En
résumé, le libéralisme est un système dans lequel s'épanouit celui qui
utilise sa raison, qui fournit des efforts, qui échange ou s'associe librement avec
les autres, notamment pour designer un gouvernement à qui ils délèguent le
pouvoir de faire respecter les droits individuels. Dans ce système, le
transfert des biens d'un individu à un autre ne se fait pas par décret, redistribution, expropriation, vol, pillage
Dans tous les autres systèmes, un pouvoir central domine peu ou prou l'individu, et exerce sur lui diverses spoliations.
Le
libéralisme, contrairement à tous les autres régimes, n'admet pas la seule inégalité qui soit vraiment
Jacques
de GUENIN