Un soir du 21 avril


Le Libéralisme light a vécu

A en lire ou a en regarder les media, certains ont passé un mauvais dimanche la semaine dernière. Ce fut au premier chef  le cas des politiciens et de tous ceux qui vivent de la classe politique. N’appartenant pas à ces catégories là, j’ai profité d’une sacrée bonne soirée avant de prendre une semaine de vacances.

J’espérais sans trop y croire un coup de boutoir dans le système, une bonne surprise aurait pu venir de Madelin mais c’était malheureusement peu probable. A tort Madelin est assimilé à un technocrate de l’establishment, son discours n’a pas été relayé et n’a pas convaincu en ce qui concerne la première préoccupation de la campagne : l’insécurité. Un libéralisme lissé, sans éclat ni provocation ennuie  les media et ne suscite pas les passions. 

Madelin n’avait pourtant rien à perdre à changer la forme de son discours pour se faire entendre puisque le « néolibéralisme » a été récemment bien plus conspué que le lepénisme. Rien à perdre à effrayer les véritables technocrates puisque des caciques de DL l’avaient déserté pour Chirac, espérant être payés de leur trahison, et que d’autres libéraux avaient fait le choix de voter Chirac ou encore pour cet anti-libéral de Le Pen le troisième homme en pensant qu’il aurait ses chances de figurer au second tour et donc de secouer le cocotier, de faire chier les journalistes quoi !

Que Madelin participe personnellement à la marche pour le capitalisme, qu’il s’en prenne ad hominem à José Bové, qu’il nous relaie sur des actions antifiscalistes et qu’il reconnaisse en matière de sécurité le droit à l’autodéfense. Alors là Madelin deviendra un Le Pen qui aura lui toutes ses chances de changer les institutions.

Quoique j’entende donc, je ne peux cesser de penser que ces résultats témoignent de l’acceptabilité des thèmes libertariens dans la population française.

Que c'est beau un socialiste qui pleure !

Mais reprenons le fil des événements : il n’est pas encore 20 heure que tous les gratte papiers font la gueule, ils savent déjà !

Les chiffres tombent, le second tour se disputera entre Chirac et … Le Pen, Jospin est éliminé au premier tour !!!! Je zappe tout de suite sur le journal des élections de canal + présenté par Karl Zéro et sa bande de gauchistes, avec en invité José Bové. Putain la gueule qu’ils tiraient tous, j’exulte littéralement de les voir s’étrangler de rage. Bové le démocrate nous dit que Le Pen n’a pas sa place dans ce débat, Pierre Arditi et d’autres comédiens prétendent entrer en résistance dès ce jour. Ailleurs Martine Aubry est au bord des larmes, les autres proclament que le fascisme est à nos portes, seuls Nicolas Sarkozy et Jean-Louis Borloo ont des choses intéressantes à dire et ne cèdent pas à l’hystérie. Ils parlent de la raclée d’une gauche qui n’a pas su répondre aux attentes des Français, à l’arrogance de la classe politique qui ne veut pas lâcher ses prérogatives. Je sens là poindre un discours libertarien sortant du politiquement correct (évidemment entre le dire et le faire...), un discours plus tard balayé par Chirac lui-même et cette gauche hargneuse qui refuse le profil bas et trouve rapidement un nouveau candidat qui lui ressemble. Malheureusement ce n’est pas de ce côté là que l’on évoque la clique des copains et coquins, propose l’abandon de l’impôt sur le revenu, la retraite par capitalisation ou la dégauchisation des livres scolaires.

21 heure 30, les socialistes pleurent à Paris, que c’est beau un socialiste qui pleure, comme son chagrin fait plaisir à voir. Jospin quitte la carrière, il choisit sa retraite de premier ministre, je l’aurais préféré chômeur sans indemnité car démissionnaire. Le principal c’est quand même qu’il se casse. Les communistes du nain de jardin sont ratiboisés mais les trotskos se voient pousser des ailes, avec presque 12 % ils font le pari sur la révolution et le goulag en France dès cette année, déjà les blanches colombes de l’anti-racisme se rassemblent dans des manifestations spontanément organisées par la LCR.

La remise en cause de la démocratie

Il faut donc manifester contre la démocratie, on se tuait à le dire et nos ennemis le font. Nous disions que la démocratie ne devait pas donner aux hommes de l’État le pouvoir de gérer notre vie, ils disent que la démocratie n’est acceptable que lorsque le peuple vote correctement et là visiblement le peuple de France leur fait honte, il ne sait pas bien voter. 

Dans les jours qui suivent des propositions vont être faites pour modifier cela : une chorégraphe connue du nom de Karine Saporta propose de créer un permis de vote (inutile de dire mes amis que vous seriez tous recalés à ce permis là), un « collectif citoyen » (double insulte à mes oreilles) demande au conseil constitutionnel d’annuler le premier tour car ceux qui n’ont pas voté ne savaient pas qu’au deuxième ils n’auraient pas le choix entre Chirac et Jospin … 

Enfin la LCR et LO, Sud, Attac, la FSU, … invitent à se manifester contre l’extrémisme politique, ces champions du centrisme paisible consistant à pendre le dernier patron avec les boyaux du dernier curé, préparent le troisième tour social. En langage trotskos cela signifie que le pouvoir est à prendre par la rue.

 Agit-prop révolutionnaire

La chasse aux lepénistes s’organise, ces derniers se font discrets et quelques voitures brûlent. 

Les fédérations syndicales d’enseignants fanatisent leurs élèves les plus décérébrés, les cathos marxistes du CCFD, riches de la « collecte des derniers francs », engagent leurs moyens dans les premiers troubles. Dans les jours qui suivent le climat pourra prendre des allures insurrectionnelles à cause de cette démocratie dont les Français ont mal usé à hauteur de 20 % des votants, on pourrait presque introduire la notion d’abus de droit – de vote  - comme on le fait pour punir les contribuables qui se défendent. De droit il n’y en a plus dans cet État, les hommes politiques sont nus et jour après jour le caractère usurpatoire de leur règne se révèle. La victoire de Le Pen n’est pas possible, ne l’envisagez pas car elle signifierait la guerre civile, elle n'est d'ailleurs pas non plus souhaitable quand on entend éructer un Carl Lang contre le "capitalisme apatride".

Il aurait été plus simple alors d’interdire au FN de se présenter comme cela a failli être le cas avec les 500 signatures d’édiles, de dissoudre le FN pour inconstitutionnalité. Pourquoi pas après tout, les partis politiques ont pour objet la défense des libertés individuelles, la liberté, la propriété, la défense contre l’oppression. Alors chiche, mais à ce titre il n’y aurait plus qu’un seul parti : celui des Libertariens.

 Nous n’en sommes plus là, les media nous le disent le mal est fait et la honte est sur nous.

Je pensais que c’était là le leitmotiv de la gauche, ce n’était pas celui de Sarkozy mais c’est aussi celui de Chirac.

Vous êtes étonné ? Franchement pourquoi l’être ? Chirac dénonçait la mondialisation sans âme, envoyait son secrétaire général à Porto Alegre, il exprime maintenant son « inquiétude pour l’avenir », car « l’expérience, l’histoire de toutes les démocraties montre que chaque fois que l’extrême droite réussit à prendre légalement le pouvoir, cela s’est très très mal terminé ».

Il croit donc au loup et endosse ainsi le costume qui lui sied le mieux, celui de candidat unique de la gauche. Son discours s’infléchit légèrement en conséquence, l’insécurité n’est pas liée à l’immigration mais à la pauvreté, vous savez celle de la fracture sociale et des tentations de la société de consommation. Chirac pousse ses pions aussi vers la LCR puisqu’il « appelle très solennellement les Françaises et les Français à être déterminés, notamment pour ce qui concerne le refus des extrémistes, mais dignes et raisonnables », quand même !

Un deuxième tour pour Chirac ?

Ma joie du dimanche en prend un petit coup, le système sécrète ses propres défenses et protège ses élites. Il me reste que l’on ne pourra plus me reprocher d’envisager le bulletin nul au second tour, je ne risque plus de faire gagner Jospin. Exit Jospin, nous aurons en réalité le candidat Chirac, vers lequel les voix de la gauche vont se porter, et puis Le Pen, il y aussi le bulletin nul que nous a proposé Philippe Lacroix.

Cela étant, il ne me paraît pas possible de voter pour le candidat de la gauche, pour le reste faites comme vous le sentez et profitez du ciel bleu.

Bien sûr le programme du FN est incohérent à force de vouloir ratisser large, mêlant anti-mondialisme gauchiste, nationalisme étroit et obtus. Ce n’est pas, et son promoteur le sait, un programme réaliste. Et pourtant, jouant l'attrape tout du non-politiquement correct, il ose même des thèmes libéraux. Cela ne prouve pas que ces points du programme seraient appliqués, mais cela prouve qu’ils sont populaires.

Voilà pour l’anecdote du programme, que vous restiez chez vous, votiez par le bulletin de Lacroix, faîtes le nécessaire pour accorder le moins de voix possible à Chirac vainqueur de toute façon. Le but n’est pas de mettre Le Pen à la présidence - on se demande bien quelles conneries celui-là pourrait faire - mais de faire barrage aux aspirations de la gauche. On ne retiendra pourtant que les pourcentages de chacun faute de reconnaissance des blancs et nuls.

Alors quoi que vous fassiez, le 5 mai les Libertariens seront, si vous me suivez en ce sens, des adversaires résolus de la présidence Chirac puis de son gouvernement de majorité présidentielle de gauche, ou de cohabitation de gauche.

La gauche en France, laminée au premier tour, sait s’imposer au second voire aux législatives. C’est cela la honte de la France et contre cette honte là je vous appelle tous à vous tenir prêt à la mobilisation.

Xavier COLLET, le 30 avril 2002

Le candidat unique de la gauche

Une semaine après mon mail de commentaire sur le battage médiatique du premier tour, mes inquiétudes se confirment.

Nous vivons depuis 15 jours un climat de guerre civile pendant que la classe politique de « droite » a décidé de se discréditer au grand raout organisé par les anti-libéraux de Marianne. Ce que nous prenons pour leur humiliation n’est qu’un ralliement facile au camp du collectivisme le plus sectaire. 

Oui, le socialisme règne et manie la terreur sous Chirac. Regardons en face la scène que l’on nous joue : les Français sont culpabilisés, traités de Vichystes par les insinuations du président en exercice, alors que les manifestations organisées par le trotskisme triomphant ont étalées une haine comme je n’en ai pas souvenir, Chirac félicite cette « génération morale ».

Il n’est donc plus possible de parler libéralisme, d’oser le moindre débat quand la gauche émotionnelle fabrique le  programme du futur gagnant.

Nous aurons donc le dogme du principe de précaution , un nouveau droit à … l’environnement, au revenu minimum d’activité et au revenu jeune nommé CIVIS. Nous conserverons le principe de répartition, le mythe du développement durable et l’esprit de résistance contre la mondialisation qui détruit dans « un monde instable, globalisé, un monde qui souffre, où les équilibres naturels se dégradent » dixit la profession de foi du seul candidat. 

Alors dimanche rendons la victoire du candidat unique de la gauche la plus mince possible et ensuite serrons les rangs avec ceux qui n’ont pas failli, je pense notamment à Madelin, les autres qu’ils disparaissent ils ne sont plus des nôtres.

 

Xavier COLLET, le 4 mai 2002