Richesses virtuelles


Le Petit Quotidien, des éditions Play Bac, est un journal de 8 pages qui s'adresse aux 7-10 ans, il cible les écoles avec un succès indéniable. Le corps enseignant de primaire apprécie ce media accessible, destiné à faire découvrir l'information aux petits et à leur donner la curiosité d'apprendre. Malheureusement le succès de ce journal auprès de ses prescripteurs implique qu'il sacrifie au politiquement correct.

Les multinationales pillent les pauvres (comme chacun devrait le savoir !)

Or parmi ce qu'il convient de faire apprendre aux petits on peut situer en bonne place le pillage des pauvres de la planète par les multinationales ou plus simplement les riches voleurs.

C'est un peu dans cet esprit que les enfants apprennent que les Indiens d'Amazonie sont riches car ils possèdent la forêt et son caoutchouc qui vaut si cher, malheureusement des gens qui viennent d'ailleurs coupent les arbres et exploitent le caoutchouc.

Quand on a huit ans on comprendra certainement, avec l'aide de la maîtresse, que c'est les vilains gens de chez nous ou de l'Amérique qui pillent les richesses des Indiens et donc les appauvrissent. Plus tard, des économistes charlatans développeront ce point et apprendront aux collégiens l'impérialisme, le racisme en confondant un peu tous les concepts, on en finirait par se demander si on pique le caoutchouc aux Indiens pour les faire chier - racisme évidemment - on pour s'enrichir sur leur dos en les maintenant dans la dépendance - impérialisme - ?

En tout cas les enfants pourront imaginer comme les Indiens devaient être riches avant qu'on leur vole leur caoutchouc, ils devaient porter des Nike avoir une superbe piscine et des villas de 12 pièces … Mais non cette richesse est virtuelle, le caoutchouc n'avait pas une gigantesque utilité pour les Indiens. D'ailleurs le caoutchouc n'a de valeur que si on peut en faire de la gomme, le transformer en pneus, en figurines, en ustensiles. Or durant les milliers d'années pendant lesquelles les Indiens possédaient leur caoutchouc, ils n'en prélevaient que peu, surtout pour confectionner des remèdes, pas de quoi lui conférer la valeur qui est devenue désormais la sienne.

Et les déchets deviennent richesses

Dire que le caoutchouc représentait une richesse pour les Indiens est donc une absurdité économique. Il a fallu les applications modernes, la vulcanisation pour que ce produit devienne une richesse, comme il faudra les besoins énergétiques du développement industriel pour que le pétrole devienne une richesse dans les pays Arabes. Cela ne nous empêchera pas de trouver quelques couillons pour enseigner que les Arabes étaient un peuple riche de ses ressources naturelles pillées par les multinationales pétrolières. J'imagine l'attitude du berger du désert faisant jaillir le pétrole de la roche en lieu et place d'une source d'eau, dommage que l'on soit en l'an mille de l'hégire devait-il se dire tout en pleurant sur le fait que cette saloperie polluante prenne la place d'une source de vie. Le berger ne savait pas qu'il était riche de ce déchet qu'il maudissait et qui ne lui occasionnait que pertes et tracas. Et dire que plus tard un idiot le croyait riche, il suffirait d'ailleurs de bien peu de chose, une innovation technologique, pour que le pétrole redevienne ce déchet carboné et renvoie les émirs à leur pauvreté originelle.

Mais nous aussi en France, nous sommes riches et nous ne le savons pas. Nous avons sur ce territoire une concentration impressionnante, et peut-être unique dans l'univers, de glands humains, qu'ils soient économistes, politiciens, piliers de bistro ou militants citoyens. L'insondable profondeur de leur connerie fera un jour se plier de rire nos descendants, lesquels paieront à prix d'or leur dose d'humour, recherchant désespérément une intervention de Buffet, Fabius ou Chirac. En attendant la connerie rapporte tout de même un peu, mais si vous voulez faire de vos descendants les rois du pétrole conserver précieusement vos enregistrements de Karl Zéro, d'Ardisson et des Guignols. Cela vaudra de l'or un jour.

Xavier COLLET, le 24 septembre 2006