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Darby Report du vendredi 15 mars 2002

 Les crimes de Mugabe

Darby Report du vendredi 15 mars 2002, traduit avec l’accord amical de Michael Darby, rédacteur en chef et un des organisateurs de la marche pour le capitalisme en Australie.  

Le Tribunal Pénal International pour Mugabé

Élections truquées au Zimbabwe : Mugabe, fraudeur et assassin

 Nous soutenons cette déclaration du président américain George Bush : « Nous ne reconnaissons pas les résultats de cette élection car nous pensons qu’elle a été truquée ». Cette position est soutenue par la communauté pour le développement de l’Afrique australe et par les observateurs du Commonwealth. Le gouvernement du Nigeria a fait volte-face suite aux premières déclarations intempestives de ses observateurs, il reconnaît désormais que le déroulement du scrutin a été entaché de graves irrégularités.

Suit une lettre reçu par un Zimbabwéen :

 

La fin du troisième acte ?

 Je suis resté debout tout la nuit dernière, je ne pouvais pas aller me coucher et me réveiller en me disant que ce n’était pas un cauchemar. Mon optimisme et ma foi dans le processus électoral ont été trahis, cette fois la démocratie n’a pas gagné et nous allons tous en payer le prix.

Quand j’ai relevé les résultats par zone géographique, je ne pouvais pas leur accorder crédits face à ce que je savais de l’état de l’opinion dans certaines villes. Voir Mugabe l’emporter à Tsholotsho c’était un peu comme imaginer Hitler gagner un concours de popularité dans un camp de concentration ! Certains résultats correspondaient aux attentes, c’était le cas là où la présence d’observateurs du MDC (à ne pas confondre avec les sbires du collectiviste Chevènement) était forte, pendant et après les élections, la violence était minimale et les relations entre les partis étaient normales. Partout ailleurs les résultats étaient pour le moins fantaisistes. Tout ceux avec qui nous avons parlé nous ont dit que les votes ont été influencés et modifiés par la fraude électorale. 

Ce n’est pas seulement la vision du MDC, mais celle des faits. Ainsi, au Matebeleland, là où le MDC a pu avoir accès aux listes électorales, les résultats ont conclu à 6000 bulletins de plus que le nombre de votants.

Il était absurde de s’attendre à ce que Mugabe arrive en tête dans cette région, après le génocide des années 80 et après l’incapacité du Zanu PF de gagner le moindre siège au Matabeleland en 22 ans d’élections. Non ce n’était pas possible quand on sait que le Zanu PF de Mugabe n’a jamais créé un seul emploi dans la région, n’a jamais permis de nourrir qui que ce soit, n’a pas réagi aux inondations, a terrorisé la population entière. 

Depuis dimanche 1 500 adhérents du MDC ainsi que des observateurs ont été jetés en prison. Des centaines d’autres ont été empêchés d’exercer tranquillement leur profession et ont passé le week-end à se cacher des troupes du Zanu PF, un certain nombre ont été tués et d’autres blessés. Parmi les 1 400 candidats au titre d’observateurs, seulement 400 ont été autorisés à observer le déroulement du scrutin, encore que dans des conditions particulièrement restrictives. Plus de 40 % des bureaux des campagnes n’avaient aucun observateur du MDC, pour une raison ou pour une autre. 

L’autre élément à porter à votre attention est que les observateurs officiels appointés par l’ indépendante (sic) commission électorale étaient des militaires ou des policiers. Leur attitude fut particulièrement hostile à l’égard de tout homme du MDC et très attentive au déroulement des opérations. Ils participèrent seuls aux opérations de transport des bulletins puis à leur comptage et se rendirent coupables de fraudes très voyantes au vu et au su des medias. 

Alors maintenant que faire ? Si cette supercherie est un morceau d’une pièce en quatre actes dont le premier acte était le référendum, le deuxième les législatives de juin 2000, alors le troisième était bien cette élection présidentielle.

Le terrain est mûr maintenant pour l’acte final. Comme dans toutes les bonnes pièces, le public ne sait pas encore comment l’intrigue va tourner et anticipe un suspens. Pour les acteurs j’espère que cela ne sera pas trop tendu ! En ce qui me concerne je me sens groggy comme si j’en étais au douzième round d’un match de boxe contre un champion poids lourds. Mon cœur va vers les centaines de volontaires du MDC qui ont tout donné pour faire du troisième acte notre succès, un succès confirmé par une salve d’applaudissements. 

Ce soir le Zanu PF célèbre sa victoire, mais ils ont tort. Le prix est amer. Ils devront résoudre les maux qu’ils ont généré : chômage, pénuries alimentaires, réserves de change à zéro, chute des exportations, augmentation des dépenses courantes, déficit budgétaire pharamineux, attentes de ceux à qui ils ont promis la lune en cas de victoire. Nous avons besoin de 2,2 millions de tonnes de vivres pour nourrir le peuple dans les 15 prochains mois. Aujourd’hui en ville il n’y avait plus d’huile, plus de maïs, plus de margarine, plus de sucre, plus de boissons fraîches, plus de savons. C’est juste là l’apéritif et ils n’ont pas la moindre solution. 

L’équipe d’observateurs africains qui a rendu son rapport donne des conclusions divergentes, il y a aussi ceux qui soutiennent comme les officiels  namibiens qui parlent « d’une expérience électorale normale », les officiels sud-africains qui évoquent « un reflet des aspirations populaires ». Le président Sud-africain Mbeki a soutenu ces vues et a annoncé qu’il se tiendrait aux côtés du Zimbabwe pour résoudre le problème des terres et pour aider au financement de l’économie. Les marchés sud-africains ont immédiatement réagis à la baisse et le rand a perdu de sa valeur sur les marchés des changes. Un commentateur américain a dit qu’une telle déclaration déshonorait l’aura de Nelson Mandela sur l’Afrique du sud et relayait ce pays au niveau de ses peu démocratiques voisins. Certains ont aussi annoncé la ruine de l’initiative pour l’Afrique parrainée par l’Afrique du sud et le Nigeria. 

Ainsi ce bidonnage va continuer à pourrir la région. Je n’imagine pas Mugabe revenir sur son attitude sur le problème des terres et les fermiers blancs ont du souci à se faire, ils n’en pouvaient plus et maintenant ils sont perdus. La récolte d’hiver est foutue et les préparatifs pour la récolte de tabac d’été sont en mauvaise passe. La sécheresse ne s’arrête pas et nous devons anticiper des pénuries jusqu’en 2004. Joseph Madea a dit l’autre jour :  « nous avons appris notre leçon et désormais nous conserverons un stock permanent de deux années de grain », il nous en apprend ainsi sur son incapacité de gérer les réserves proprement. 

La remarque qui consiste a dire que les élections au Zimbabwe sont acceptables selon des critères africains, n’est rien d’autre qu’une remarque raciste. Les critères à retenir n’ont pas à être spécifiquement africains mais universels. 

Nous avons officiellement rejeté les résultats de cette élection et l’acte final va se jouer. Qu’allons nous faire ?

Charlie d’Harare, le 13/03/2002

 Vérité et mensonges au Zimbabwe

 Je suis un Zimbabwéen né dans ce pas comme ce fut le cas de mes parents. Je ne demande aucune autre nationalité, contrairement à beaucoup de mes amis blancs je n’ai aucun autre endroit où vivre et préfère rester avec mes compatriotes aussi bien noirs que blancs.

Cette semaine, un nombre incalculable d’amis, de collègues et d’employés noirs se sont littéralement effondrés à l’annonce des résultats de l’élection. Je me suis moi-même engagé depuis deux ans dans le militantisme, maintenant je vais m’adresser à vous avec toute la douleur qu’offre la perspective de six années supplémentaires de règne de Mugabe alors que nous ne tiendrons pas plus de trois mois. Comme tout personne normale et paisible, je ne comprends pas ce qui se passe dans ce pays.

Ne croyez pas une seconde que les gens de la campagne aient pu voter Mugabe. Ils ne l’ont pas fait, ce sont les séides de Mugabe qui l’ont fait à leur place, cela n’est d’ailleurs pas difficile puisque le MDC était écarté de 42 % des bureaux de vote. Les chemins des bureaux de vote étaient occupés par des militaires en armes et bérets rouges dont l’objet était clairement destiné à l’intimidation, ainsi là où la pression était la plus forte comme à Mashonaland Est, le parti de Mugabe emportait 80 % des voix. Ce qui impliquait un rythme de vote de 14 par minutes alors que dans un des bureaux urbains les plus fréquenté, la recherche du votant sur les listes électorales, la vérification de ses papiers, la remise du bulletin puis le vote prenait au moins une minute par personne.

 Alors pourquoi est ce que les organisations internationales, les gouvernements, les Nations Unies, le Commonwealth en font si peu pour nous aider ? Ils palabrent alors que nous avons besoin d’une action immédiate, on se croirait de retour chez les Munichois dans les années 30. Est ce qu’il faudra attendre 50 ans pour charger Mugabe de ses atteintes aux droits de l’homme et dénoncer le nettoyage ethnique de Gukurahundi ?

Pourquoi craindre de sanctionner un homme qui n’a pas une once de morale. La manière dont la communauté internationale traite Mugabe ressemble à celle de la mère d’un sale gamin qui cède à tout ses caprices pour le faire taire et qui ne reçoit de sa part que moquerie dès qu’elle tourne le dos.

Les sanctions il s’en moque bien parce que l’on peut être sûr qu’il a suffisamment d’argent planqué à droite et à gauche pour ne pas en souffrir.

Je sais qu’il n’y a pas de loi internationale pour changer le cadre juridique de ce pays, mais il est temps de changer cela avant de déplorer un million de morts ici. On peut appliquer les règles si les deux camps les connaissent. Ainsi un gouvernement de coalition ne servira à rien parce que Mugabe n’écoute même pas ses parlementaires et en a acheté une bonne partie. 

Les gens en ont assez de voir des collègues se faire mystérieusement tuer dans des accidents automobiles parce qu’ils ont eu le courage de s’exprimer. Il ne sert à rien de le constater et d’aller en justice car les juges aussi sont à la dévotion du régime, il est étrange de réaliser que tant de nouveaux juges mettent la main sur les fermes réquisitionnées !!!

 Mugabe s’est assuré une majorité aux législatives en volant 30 sièges qui auraient du revenir au MDC, la campagne a été semée de meurtres et nous sommes condamnés à ne pas nous défendre.

Ne négligeons pas la peur, les forces du pouvoir s’en servent à plein régime. Imaginez un gosse qui a vu toute sa famille enfermée dans une hutte à laquelle ils ont mis le feu, 15 ans plus tard imaginez comment ils réagira quand de même hommes à béret vert viendront le chercher pour l’emmener voter.

 Demandez à la BBC de vous remettre une copie du film « le prix du silence », regardez ces pompeux hauts commissaires et diplomates étrangers, écoutez les tels que je les ai enregistrés : « on dit qu’il y a eu des brutalités », « c’est honteux quand même », « les rapports sont bidouillés », « évitons de nous trouver là », « ne nous risquons pas dans cette affaire », « usons de la plus grande diplomatie », « nous nous sommes adressé à eux avec courtoisie mais ils n’écoutaient pas, alors nous sommes partis nous n’avons rien pu faire », « nous le condamnons mais n’avons pas le droit d’interférer ».

La honte soit sur ces gens là, comment ont ils pu se contenter de faire si peu alors qu’ils savaient que des massacres avaient lieu.

Réveillez vous ! Ce gars là n’a aucune limite. Il faut écouter et protéger quelqu’un comme le révérend Pius Ncube, il mérite d’être reconnu au plus haut niveau. Quand vont-ils arrêter Perence Shiri pour ses crimes contre l’humanité ainsi qu’ils l’ont justement fait pour Milosevic.

Mugabe est un monstre, il laisse ses victimes derrière lui pour en faire dans les villages les témoignages de ce dont il est capable. Vous voulez savoir ce qui se passe, facile, il y a des centaines de témoignages documentés par le fonds Amani, ils sont disponibles à tous ceux qui auront les tripes de les lire.

Il se sert maintenant des fermes pour allécher ceux dont il désire faire ses partisans, ce ne sont pas les sans terres qui en profitent. Après tout si ces terres pouvaient produire de la nourriture pour le peuple, les fermiers aideraient avec plaisir les paysans pauvres à démarrer leurs exploitations. A quoi cela sert donc de les offrir aux vétérans de guerre – un vrai vétéran de guerre dans ce pays devrait être en retraite car s’il a participé à la guerre de libération il a du servir au moins pendant 5 ans de sa vie d’adulte et devrait donc atteindre au moins 45 ans. La terre doit être disponible plutôt pour les jeunes Zimbabwéens qui sortent de l’école d’agriculture, pour cela user donc de ce que vous avez déjà volé au lieu de confisquer plus encore.

Nous ne pouvons pas mener d’insurrection au Zimbabwe car, contrairement à ce que croit Mugabe, nous n’avons pas d’armes. Si le peuple devait se soulever alors il se ferait massacrer par cette armée gigantesque qui a épuisé les ressources du pays depuis des années. Et puis notre principale préoccupation reste de trouver de la nourriture pour nourrir notre famille.

Mugabe a démontré qu’il se foutait de la santé économique du pays. Les effets de la crise ne touchent plus seulement le peuple, et puis la plus grande partie de son armée est constituée de nos parents, ils sont forcés d’agir en  faveur de ce en quoi ils ne croient pas sous peine de se faire tuer et faire tuer leur famille.

Un de mes amis s’est fait arrêter ce week-end  (comme 1 300 autres personnes) parce qu’il portait une catapulte, un jouet que des petits garçons possèdent à partir de 6 ans ! Il est toujours en prison, ou je devrais dire en camp de concentration. Car les prisons ici ne sont pas comme en Europe, il n’y a pas de télévision ou de livres à lire. Les prisons ne s’occupent pas de loisirs, d’éducation ou de réhabilitation. Les toilettes y sont hors d’usage et on ne peut y aller que deux fois par jour. La couverture qu’ils vous donnent est tellement crasseuse et souillée que l’on préfère geler la nuit plutôt que d’en faire usage. Vous ne pouvez pas porter de sous-vêtement et ne pouvez rien recevoir de l’extérieur : pas de savon, pas de dentifrice, pas de papier toilette, vous êtes donc exposé à la dissémination du sida.

Ainsi pour une femme une peine de prison est une peine de mort. La nourriture y est de deux bols de porridge par jour, il y a 20 prisonniers dans des cellules de 6. Pour dormir il faut prendre son tour, bien sûr chaque prison est équipée de sa salle de torture.

Alors cela ne sert à rien de demander de refaire les élections, Mugabe nous referait le coup et puis les observateurs Sud-africains ont trouvé cela très bien.

Que faire donc ?

Envoyez nos témoignages à tous ceux qui s’intéressent à ce qui se passe au Zimbabwe, demandez leur de transmettre l’information à vos représentants, informez les Organisations internationales. Manifestez devant les ambassades du Zimbabwe, distribuez des tracts.

 Je risque deux ans de prisons pour avoir fait passer ce message, vous comprendrez alors que je désire rester anonyme. Merci de votre soutien.

Un Zimbabwéen anonyme, le 22/03/2002


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