La tragédie des communs
Extraits
:
Si
pas d'exclusivité alors exploitation outrancière des biens collectifs
et épuisement de leur valeur. L'exemple de la mer, de sa faune et
de sa flore, est le seul exemple où chacun en poursuivant son propre
intérêt concourt, au détriment de tous, à l'épuisement de la ressource
même que chacun convoite. Il y a de problème d'environnement que là où
il n'y a pas de propriété. George BERTHUS |
Application
du concept de coût de transaction : si la propriété
d'un champ est communale et que l'un
des membres de la communauté villageoise fait
paître soudain deux fois plus de bétail
que ses concitoyens, il nuit légèrement à chacun des membres de
la communauté (s'il y a 100 foyers dans le village, chacun d'eux subit
un dommage de 1/99) et en tire un gros
avantage (doublement de son chiffre d'affaire).
Une assemblée générale peut se réunir pour expliquer
au contrevenant qu'il ne doit pas doubler le nombre de vaches sur le pré,
mais en fait personne n'a un intérêt vital à le faire (sa perte
n'est que de 1/99) et cette procédure coûte cher
(si la réunion dure 2 heures, ce sont deux cent
heures qui sont consommées, c'est à dire l'équivalent de 5
semaines de travail d'un individu). Pour
éviter tous ces inconvénients, il est préférable d'attribuer des
droits de manière privative à chaque individu (création
de la firme individuelle) et de permettre à celui qui est
très intéressé par le champ d'entrer en négociation avec chacun
des 99 autres membres pour leur acheter le droit d'aller faire paître
ses vaches 3 ou 5 jours par an. Pour éviter des coûts de transaction trop
élevés, il négociera, en fait, avec un ou deux entrepreneurs privés
et réalisera une opération de fusion ou de concentration (début
du processus de croissance de la firme). Henri LEPAGE |
L'absence
de droit de propriété exclusif conduit à ce que personne n'a un intérêt
individuel à se préoccuper des conséquences à long terme
des techniques de pêche actuellement utilisées. Si la mer appartenait
à quelqu'un, l'intérêt de ce propriétaire serait d'empêcher
que les utilisateurs de son bien ne compromettent la valeur de son
capital en l'épuisant. Un calcul coût‑bénéfice
très simple le conduirait à consacrer un certain
volume de ressources (coûts) pour assurer la police
de sa propriété et veiller à ce que les
utilisateurs n'en compromettent pas le potentiel productif. Roger Leroy MILLER |
Ah
mais ça devait arriver forcément ! Déjà on se rappelle bien les batailles
navales dans le golfe de Gascogne entre les pêcheurs espagnols et français,
c’est que ça chauffait et que dis-je ça chauffait, le torchon brûle encore.
Un beau jour les media en ont parlé, eh oui il a failli y avoir mort d’hommes,
la flotte transpyrénéenne avait carrément éperonné un bateau de pêche.
Xavier
COLLET
|
Parce qu'elle requiert soin et attention, la propriété est une véritable école de moralité. C'est la leçon que nous donne celui qui gère ses biens en "bon père de famille", si souvent cité en exemple dans les ouvrages habituels de morale (...) La valeur morale de la propriété vient de ce qu'elle incite son possesseur à la traiter comme on traite ce dont on n'est que le dépositaire, au nom des enfants ou des petits enfants auxquels on entend un jour la transmettre. Pour en être persuadé, il suffit de voir le contraste qui apparaît dans notre attitude dès lors que nous avons affaire à une propriété collective et non plus à une propriété privée ; la négligence dont nous faisons généralement preuve dès que nous utilisons une propriété publique. Ce ne sont pas les comportements que l'on observe dans les pays dits socialistes qui nous démentiront. Arthur SCHENFIELD, "Capitalism under the test of ethics" |
1. A partir de ces différents textes définissez la tragédie des communs.
La tragédie des communs est une situation dans laquelle chacun cherchant son intérêt particulier nuit à l'intérêt de la collectivité. On peut parler là d'une externalité négative. Dans ce cas personne n'a intérêt à économiser les ressources qu'il prélève ou à limiter sa pollution. Celui qui s'occuperait d'entretenir les ressources travaillerait en fait pour les autres qui profiteraient de cet entretien sans en payer le prix. Les ressources communes seront donc plus rapidement endommagées que réparées.
2. La tragédie des communs est-elle due à une limite du pouvoir de régulation du marché ?
Les théoriciens favorables à l'intervention de l'Etat parlent souvent des externalités pour montrer que les solutions de marché ne sont pas optimales. Ils proposent alors de taxer les producteurs d'externalités négatives ou de réglementer leurs activités pour leur faire payer ce qui est pris en charge par la collectivité ou encadrer les externalités produites. Ces textes nous montrent que cette solution n'est pas possible dans tous les cas, souvent les coûts du contrôle sont même supérieurs aux coûts collectifs générés par les seules externalités (voir le champ communal avec les coûts de transaction).
En réalité la tragédie des communs n'a rien à voir avec une limite du pouvoir de régulation du marché, au contraire puisqu'elle ne peut être surmontée que par la définition de droits de propriété sur ce qui appartient à tout le monde (donc à personne et de fait à l'Etat). Elle se résume par le principe selon lequel ce qui appartient à tous est l'objet des moindres soins alors que ce qui appartient à quelqu'un est entretenus et préservé.
Evidemment dans le cas d'une rivière ou d'une mer le poisson appartient à celui qui le pêche, or les nouveaux moyens de pêche permettent d'épuiser les ressources. Mais qui aurait intérêt à les préserver puisque ce qui n'est pas pris par nous le sera par un autre. La réponse passe par la définition de zones de pêches privées.
3. Comment résoudre la tragédie des communs ?
En matière de pollution une rivière appartenant privativement aux riverains impliquerait procès pour atteinte à la propriété si un industriel la contaminait. Là encore l'externalité négative serait conduite à disparaître.