Promotion officielle de l'anti-capitalisme à l'école

 

La contre campagne 2007

Après deux campagnes contre la semaine de l'anticapitalisme à l'école, j'apprends un peu tard que la semaine de la coopération à l'école a eu son édition 2007.

Édition peut-être plus discrète dans la mesure où le courrier annonçant son organisation ne m'est pas parvenu, ni même le fascicule envoyé d'ordinairement dans le mois qui suit. À moins bien sûr que l'OCCE m'ait mis sur ses listes noires … Le fascicule est néanmoins disponible sur Internet par le site de l'OCCE.

Première constatation, ce support de cours n'est plus présenté comme seulement destiné aux élèves de seconde choisissant l'option sciences économiques et sociales, il s'adresse désormais à tous les lycéens que ce soit pour la discipline sciences économiques et sociales mais aussi pour l'histoire et la géographie. Avec l'élargissement du public visé, la pagination augmente aussi passant de 32 à 46 pages. Une partie rajoutée est intitulée " société de capitaux et entreprises coopératives : deux organisation (sans s), deux modes de gouvernance " dont les sous-parties s'intitulent : " l'essor récent du capitalisme financier " et " la différence coopérative " ; ainsi que de nouvelles sous-parties sur l'éducation au développement durable et sur le " commerce équitable ".

Ce qui me saute aux yeux également est que contrairement à l'année 2006, cette semaine anticapitaliste de 2007 a été soutenue par la délégation interministérielle à l'innovation, à l'expérimentation sociale et à l'économie sociale auprès du ministère de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale. Par contre pas d'éditorial d'un sous secrétaire d'Etat comme en 2005 ni d'avant-propos d'un inspecteur général comme en 2006.

L'examen du contenu nous montre que les éléments de l'édition 2006 sont intégralement repris avec un même angle de traitement consistant à présenter ce qui est " bien " contre " ce qui n'est pas bien ". Certes une approche sommaire peut convenir pour des élèves de seconde choisissant un cours d'initiation à l'économie, mais lorsqu'il s'agit de sensibiliser à l'approche économique il faut être simple et rigoureux en expliquant la logique de l'échange par exemple et non pas en inculquant des a priori qui ont depuis longtemps fait faillite. Ceci est d'autant plus grave pour l'avenir même de cette science en France que ce fascicule ambitionne désormais être à la base de cours de première et de terminale, privant ainsi les élèves d'une véritable réflexion sur la matière au bénéfice d'une approche visant à conclure à la seule nocivité du capitalisme.

Le manichéisme comme outil pédagogique consiste donc à présenter un libéralisme inégalitaire incapable de répondre aux attentes fondamentales face à un secteur coopératif centré sur la personne. Y sont aussi encore opposés l'entreprise privée à la recherche du profit maximum contre l'entreprise d'économie sociale, la seule apparemment où le travail a un sens et plaît à ses membres, celle qui permet le développement social, local, durable. Toujours dans la même tonalité il importe de faire savoir que la société de capitaux, pire que toute les autres est au service de ses actionnaires les plus fortunés et n'est attentive qu'au court terme, certainement pas à un développement durable donc. Le capitalisme est ensuite présenté comme ayant une tendance inhérente au monopole, comme étant opaque, fondé sur l'accumulation de capitaux considérables, non transparent, détournant les règles marchandes de l'ancien échange marchand (qualifié d'économie marchande) organisé par les petites entreprises. Enfin l'idée qui revient tout au long de la brochure consiste à confondre les champs économiques et politiques, en opposant une économie sociale " démocratique " et permettant le respect des droits sociaux aux formes de l'entreprise capitaliste ploutocrate.

Les exemples de projets coopératifs donnent à nouveau une bonne place au familistère de Guise de Godin, véritable secte d'inspiration fouriériste. La MAIF est encore repris en exemple avec son objectif de " lutte contre le monstre capitaliste " sachant que les autres assurances étaient alors au service du fascisme. Les sociétés coopératives d'intérêt collectif réunissent toujours " des personnes autour de valeurs et non de capitaux "…

La nouvelle sous-partie appelée l'essor du capitalisme financier reprend sans la moindre nuance la théorie keynésiano-marxiste de la régulation opposant l'époque bénie du mode de régulation fordiste à l'émergence actuelle d'un capitalisme entrepreneurial sous la pression du MEDEF. Capitalisme entrepreneurial qui favorise la logique financière contre la logique productive, qui serait vecteur de délocalisations et de déstructuration industrielle. Délocalisation qui n'est d'ailleurs pas forcément synonyme d'exploitation de la main d'œuvre ou de pillage des ressources naturelles comme lorsqu'elle est menée par les multinationales, non il suffit bien sûr qu'elle soit menée par le mouvement coopératif international capable " de bâtir des filières de production, de distribution et de consommation équitables ", eh oui sans coopératives pas de développement des PED, mais bien sûr !

La sous partie " la différence coopérative " procède encore de l'opposition dialectique entre l'évolution déplorable vers un capitalisme financier contre l'absence d'actionnaires dans l'économie sociale permettant de limiter les effets sociaux du capitalisme qui sont l'accentuation des inégalités, l'exclusion, la désertification rurale et la paupérisation, pourquoi pas l'apparition du sida pendant qu'on y est. Alors que le secteur coopératif et mutualiste permet de concevoir d'autres types de développement, un alter développement donc. Oui une forme d'entreprise qui " subordonne la possession d'une part de capital à l'exercice d'un rôle économique et social - celui de travailleur ou celui d'usager - , la gouvernance coopérative est fondamentalement plus simple que la gouvernance capitaliste ". On aura bien compris là que l'actionnaire n'a aucun rôle économique ni social, surtout quand il est un vilain fonds de pension, on se demande donc bien de quel droit il vole à l'ouvrier la plus-value (pour payer des retraites à d'autres ouvriers qui sait) ? Le capitalisme serait bien l'exploitation et pourtant il est la condition sine qua non du développement, mais cela les élèves ne le sauront jamais et donc se condamneront par de tels cours à ne rien comprendre à la logique de l'économie. Quand à la vieille opposition prolétaires-capitalistes, elles est absurde dès lors que les prolétaires sont aussi des actionnaires.

La suite du fascicule ouvre cette année encore à des notions plus générales. Ainsi la partie relative à la mesure de la production met en valeur les indicateurs du PNUD, là encore il s'agit d'opposer IDH et PIB. Cette critique fait partie de tous les manuels de cours établissant notamment que certaines activités augmentent le PIB alors qu'elles sont " nocives ", le fascicule cite les accidents de voiture à titre d'exemple. Mais ce qui augmente le PIB c'est le rachat d'une auto neuve, les services du dépannage, de la casse, les soins en cas de blessure, … Est-ce vraiment nocif, vaudrait-il mieux ne pas augmenter le PIB en laissant la carcasse pourrir, en abandonnant un conducteur blessé pour qu'il meure sur place ? Enfin il est rajouté que le PIB augmente aussi de par d'autres activités parfaitement inutiles ? Mais qui peut dire que des activités sont inutiles alors qu'elles font l'objet de transactions sur le marché ? Si demande il y a, utilité il y a donc aussi.

Toujours dans la logique consistant à faire passer des jugements pour des vérités scientifiques, cette partie dénonce aussi la spéculation en tant que mauvaise utilisation de son argent ("spéculer quitte à prendre le risque de déstabiliser des économies "), les bonnes utilisations étant indiquées (" servir à aider les paysans pauvres du Sahel à organiser une caisse d'épargne ou permettre à des jeunes en difficulté d'insertion de créer une entreprise avec un soutien financier et formatif). On se demande ce qu'une telle considération vient faire ici, qui peut juger de l'utilisation de son argent par chacun ? Quant à spéculer ne s'agit-il pas d'une utilisation légitime de ses fonds, surtout lorsqu'il s'agit effectivement de sanctionner des politiques aberrantes menées par des États ?

La sous-partie développée sur l'éducation à l'environnement durable s'approprie la circulaire relative à cette éducation et déduit que les valeurs rattachées à cette éducation sont exactement celles des coopératives, on peut en déduire que ces valeurs sont donc contraires au capitalisme. De là à faire du devoir des enseignants une formation au rejet de l'économie de marché il n'y a qu'un pas vite franchi, cette semaine de la coopération qui donne une problématique à l'enseignement de l'économie sur les années lycée ne constitue donc t-elle pas à proprement parler une semaine de l'anti-capitalisme à l'école ?

 

La contre campagne 2006

 

Vous vous rappelez peut-être qu'au nom de l'ADEL j'ai voulu répliquer à l'opération annuelle de propagande anti-capitaliste à l'école orchestrée dans le cadre de la " Semaine de la Coopération à l'Ecole ". Opération répétée chaque année en mars et donnant lieu à l'envoi à chaque enseignant de Sciences Economiques et Sociales d'une brochure de cours de seconde dont le contenu est fait d'amalgames et de classifications douteuses ayant pour effet d'opposer un système coopératif social et humain à des " sociétés capitalistes " dont l'objectif de recherche du profit serait contraire à l'épanouissement de l'homme, néfaste à l'environnement et au développement des pays pauvres. Cette année encore l'opération est lancée et le support de cours passe de 20 à 32 pages avec exercices et corrigé fournis, ce qui permettra aux profs les plus flemmards de composer une bonne partie du cours de seconde.

Cette année encore Jean-François Draperi du CNAM s'est coltiné les articles en collaboration avec Alternatives Economiques. Cette année encore les cours sont outrageusement orientés et je vous ferais bénéficier des plus grosses aberrations prochainement. Mais cette année l'opération n'est ni soutenue par le Ministère de l'Education Nationale ni par la Délégation Interministérielle à l'innovation sociale et à l'économie solidaire. Doit-on y voir une conséquence de vos lettres et mails au ministère et à la délégation interministérielle, des coups de fils que j'ai passé à ce sujet ainsi que du relais de SOS Education qui a organisé à partir de son site une opération de cyber-activisme ? Je ne sais, mais il semble qu'à notre niveau chaque mail, chaque lettre compte et que nous pouvons faire infléchir les positions des maîtres en propagande.

 

La contre campagne 2005

 

Une campagne lancée par l'OCCE

Lancement très officiel d’une campagne au sujet de la coopération à l’école, il apparaît qu’il s’agit d’opposer la logique coopérative à celle des profits. L’aspect officiel engage ici le gouvernement lequel opère à travers la « Délégation Interministérielle à l’innovation sociale et à l’économie solidaire », émanation au nom très « alter » du Ministère des Affaires Sociales, du Travail et de la Solidarité, ainsi que par le biais du Ministère de l’Education. Sont associés à cette campagne un des organes militants de l’anti-libéralisme que nous connaissons bien, Alternatives Economiques. Les autres promoteurs partagent les mêmes biais et certains participent de près aux instances syndicales de la gauche enseignante, citons la CAMIF, la Banque Populaire à travers la CASDEN, l’OCCE. On compte aussi les représentants de la mouvance coopérative : les Sociétés Coopératives Ouvrières de Production, le Groupement National de la Coopération.

 

Le site de l’OCCE annonce la couleur : «  L'Ecole, au travers de ses programmes d'éducation civique, insiste avec de plus en plus de force sur la nécessité de former des citoyens autonomes, responsables et solidaires.  Compte tenu des enjeux auxquels la société en ce début de XXIème siècle se trouve confrontée, la coopération , au travers des valeurs et des principes qu'elle promeut, demeure un projet porteur d'avenir à la fois éducatif, social, culturel et économique ».

Tout cela semble très bien mais nécessite un petit décryptage, autant nous devons insister sur la nécessité de former des individus autonomes et responsables, autant la formation de citoyens solidaires nous échappe et ce n’est pas à l’éducation civique de transformer en ce sens nos élèves car il y aurait là une volonté d’intervenir sur les convictions incompatibles avec le devoir de neutralité de l’éducation nationale. Pourtant la solidarité est une valeur positive, apprendre à s’ouvrir au autres, à faire montre de générosité n’est pas de nature à porter atteinte à la neutralité de notre mission me direz vous ! Nous sommes bien d’accord, mais il doit être établi une fois pour toute que les qualités individuelles à développer sont du premier ressort des parents, les enseignants ont un rôle complémentaire certes, mais ils ne peuvent substituer leur vision de la solidarité à celle des enseignés sous peine de transformer leur enseignement en propagande. Et l’étude de certains manuels nous montre bien que ce glissement est très répandu. La suite de la citation de l’OCCE nous le fait d’ailleurs craindre. Effectivement, nous savons bien que les enjeux actuels de la société en ce début de XXIème siècle sont ceux de la mondialisation. C’est dans ce contexte que l’OCCE considère les valeurs et principes de la coopération, en insistant sur le projet qu’elles portent dans des domaines sociaux, culturel, économique. Décryptage là encore, les anti-mondialistes, dont l’influence est très importante à l’école (cf. texte de présentation de la mondialisation dans un ouvrage destiné à des lycéens de seconde) opposent ce qu’ils dénomment échange réciproque ou coopératif à échange marchand. Cette volonté de distinguer plusieurs types d’échange a pour objectif d’opposer une logique de lien social à une logique de marchandisation. Cette distinction est le fruit d’une théorie politiquement très engagée dans le combat contre la mondialisation, mais aussi contre la logique de l’économie de marché. Il appartient donc aux enseignants respectueux de leur devoir de neutralité de dénoncer cette campagne, de refuser l’utilisation du matériel pédagogique fourni et de demander justification du coût de cette campagne au gouvernement.

Pour ceux qui douteraient encore de la volonté de politisation de nos élèves et de l’engagement de cette campagne contre les principes de la liberté d’entreprise et de la concurrence, la phrase suivante reprise sur le site de l’OCCE ne laisse plus de doute :

"… Ainsi, par la discipline autoritaire d’une part, par le système de compétition d’autre part, sont emprisonnés les rapports naturels qui devraient exister entre les élèves comme entre eux et les maîtres… Il ne peut y avoir aucune solidarité acceptée dans une école où le maître n’est qu’un caporal ; il ne peut y avoir aucune coopération possible dans une école où les élèves pratiquent quotidiennement le chacun pour soi..."

 

Xavier COLLET, également professeur d'économie, le 2 février 2005

 

"Le commerce à l'heure de la mondialisation

La mondialisatlon de l’économie a donné un coup d'accélérateur au commerce mondial, dont le volume est dix fois plus important qu'en1950.

Depuis le début des années 80, le modèle libéral s'est peu à peu imposé comme pensée dominante.

Des multinationales comme McDonald’s ou Microsoft imposant leurs produits dans tous les pays.

Quelques ratés …

Mais la machine a montré de sérieux ratés. Les inégalités se sont accrues et de moins en moins de citoyens sont convaincus des bienfaits de la libéralisation. Les règles du jeu ont été modifiées, entre autres, par la montée en puissance de la contestation, incarnée par la société civile et les organisations non gouvernementales. Cette opposition a connu son heure de gloire en décembre 1999 à Seattle (Etats-Unis), où elle a réussi à empêcher que se tienne la conférence de l’OMC (Organisation mondiale du commerce), devenu sa bête noire même titre que le FMI (Fonds monétaire international) et la Banque mondiale."

 

Extrait du manuel IGC Seconde, éditions Bertrand Lacoste

 

 

 

Une réaction de parents d'élèves au sujet de la semaine anticapitaliste à l'école

 

Monsieur le Ministre,

Internet est un puissant outil d'information, mais tout ce qu'on y trouve n'est pas toujours exact. Aussi quand un message m'annonce l'existence d'une Délégation Interministérielle à l'Innovation Sociale et à l'Economie Solidaire alors que nous sommes censés avoir un gouvernement de droite, donc pas anticapitaliste , je suis perplexe et vous demande confirmation. Surtout quand on ajoute que dans le cadre de la Semaine de la Coopération à l'école, ladite délégation patronne en accord avec votre ministère une opération de propagande marxiste que Staline lui-même n'aurait pas désavouée.

Si cette information est vraie, nous nous préparons aux pires cauchemars avec le lavage de cerveaux de nos enfants. En tant que parent d’élève je suis franchement inquiète.  Car enfin : qu’entend on par Economie Solidaire, si ce n’est le racket des travailleurs et des chefs d’entreprise pour engraisser un peu plus nos fonctionnaires revendicatifs derrière lesquels des syndicalistes sans scrupules étanchent leur soif de pouvoir et leur haine du capitalisme ? Dans les cabinets feutrés des ministères, ignore t-on donc à ce point que chaque fonctionnaire embauché crée 2 chômeurs ? Est on si ignorants des lois de l’économie ? 

Lorsque je lis dans le programme d’économie proposé aux élèves de seconde des absurdités telles que : «  Les valeurs dominantes de la société divorcent des valeurs de l’économie dominante », je pense que Monsieur Draperi, responsable de cette belle phrase, a fait vœu de pauvreté. «  Les hommes et les femmes peuvent ils se motiver à travailler dans des organisations dont la finalité et le fonctionnement sont en contradiction avec les valeurs qu’ils défendent… ? » Tous fonctionnaires, tous dans les services publics que le monde entier nous envie, donc on supprime l’entreprise privée ! «  L’entreprise privée appartient à une ou quelques personnes réunissant un capital pour créer une activité économique… entrepreneur souvent à son compte… très différente de l’entreprise capitaliste. » Ah bon ? Ce monsieur doit confondre avec ce qu’on appelle « private company » aux USA, pour signifier que ce ne sont pas des entreprises cotées en bourse. Toute entreprise privée chez nous est de type capitaliste quelle que soit sa taille. « L’entreprise capitaliste réunit des capitaux en vue de les faire fructifier… n’a pour objet que la réalisation d’un profit ».

Fichtre ! Total, PSA, Renault, Alsthom, Dassault ne produisent donc rien et font juste des profits financiers à court terme. Eiffage qui a construit le viaduc de Millau sur des fonds privés ne recherche que le profit immédiat… Il faut supprimer toutes ces sociétés.  Avec un tel projet d’éducation on est tranquille. La France s’apprête à devenir en quelques années le Cuba européen… Ou pire !  J’espère donc, Monsieur le Ministre, que ces informations ne sont pas exactes, et si elles le sont, que cette délégation d’ignares et de nuisibles sera dissoute dès réception de cette lettre. 

Dans cet espoir, veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de mes respectueuses salutations.  

 

                                                                                       Christiane CHAVANE, Entrepreneur individuel et mère de famille, le 13 mars 2005

Semaine de l'anti-capitalisme à l'école                                              

 

Lettre à la Délégation Interministérielle à l'innovation sociale et à l'économie solidaire

Monsieur Sarracanie, 

Enseignant en sciences économiques et sociales, j’ai reçu dans mon casier personnel une brochure intitulée « Semaine de la Coopération à l’Ecole ». J’ai pu remarquer à la lecture du support de cours proposé, qu’il s’agissait là de la troisième édition d’une opération lancée par l’OCCE avec le soutien du Ministère de l’Education Nationale et de la Délégation Interministérielle à l’innovation sociale et à l’économie solidaire.  

En page 3 de ce support de cours, vous apportez un soutien très appuyé à cette opération, j’imagine donc que vous avez lu l’intégralité de ce support de cours de 20 pages et que vous y avez souscrit tout à fait. Et là je vous avoue mon inquiétude, je préférerais penser que le gouvernement n’a été qu’une dupe dans cette affaire car ce support de cours est proprement scandaleux tant par son parti pris affiché que par les erreurs flagrantes enseignées.  Ce cours d’économie  destiné à un public de seconde a été rédigé par Jean-François Draperi, directeur scientifique de l’économie sociale. Sa posture anti-capitaliste se retrouve dans chaque paragraphe de cours dont la démonstration vise à appuyer son paradigme développé en pages 8 et 9 et dont je vous rappelle la teneur :   « Les coopératives économiques : un lieu d’éducation civique Les valeurs dominantes de la société divorcent des valeurs de l'économie dominante. Les premières rejoignent plus que jamais la devise de la république: liberté, égalité, fraternité; les secondes, au contraire, s'ancrent dans les inégalités, les exclusions et la concurrence jusqu'au conflit.   La société ne dément pas la nécessité de !'efficacité, mais aspire à plus de justice et de solidarité dans l'économie.   Cette situation peut-elle perdurer ? Les hommes et les femmes peuvent-ils durablement se motiver à travailler dans des organisations dont les finalités et le fonctionnement sont en contradiction avec les valeurs qu'ils défendent dans la vie quotidienne, en famille, à l'école, dans leur village, leur quartier, leurs associations ?   On peut en doute r: l'aggravation, à l'échelle mondiale, de la malnutrition et des maladies endémiques d'une part, l'apparition de nouvelles maladies professionnelles, liées directement ou indirectement au travail et à ses conséquences humaines et écologiques d'autre part, témoignent de l'accroissement des conséquences néfastes d'une économie livrée à elle-même. Dans ce contexte, deux horizons semblent se dessiner : soit les valeurs de l'économie ultra libérale continuent leur extension et asservissent toujours plus largement les activités sociales au règne du profit, soit, au contraire, la société se donne les moyens de limiter cette extension et tente d'élargir à l'économie les valeurs démocratiques. Or, l'élargissement des valeurs de la République démocratique à l'économie est précisément le projet du mouvement coopératif.   Né il y a un siècle et demi, en réaction à la violence de l'expansion du capitalisme, le mouvement coopératif s'est développé dans tous les secteurs de la vie économique: agriculture, production, consommation, épargne et crédit. »  

Ces quelques a priori amplement déclinés donnent lieu dès la première page du cours a une distinction pour le moins originale opposant 4 types d’entreprises dont l’entreprise privée : « elle appartient à une personne ou à quelques personnes réunissant un capital pour créer une activité économique » très différente de l’entreprise capitaliste : « elle réunit des capitaux privés en vue de les faire fructifier ». A moins que l’on ne parle là d’une entreprise conglomérale, on ne voit pas bien la distinction entre l’entreprise privée et capitaliste tant il est vrai que toute entreprise privée ou capitaliste appartient à quelques personnes (même en cas d’appel public à l’épargne), qu’elle créé une activité économique et qu’elle a pour objet la réalisation d’un profit. Mais Drapieri insiste plus loin sur la différence : « dans l’entreprise privée le responsable est souvent « à son compte » alors que dans l’entreprise capitaliste, c’est le résultat financier qui prime, aussi y est-on très attentif à l’efficacité économique, et généralement à court terme (sic – à expliquer aux créateurs de start-ups), de l’entreprise. »    

Un troisième type d’entreprise est présenté : l’entreprise d’économie sociale, « groupement de personnes associées autour d’un projet. Ces personnes associées acquièrent des moyens économiques et financiers pour réaliser un projet commun ». Présentation positive et qui ne distingue pourtant pas cette entreprise de l’entreprise privée ou capitaliste, mais il est dit plus loin que « la finalité n’est pas de gagner le maximum d’argent, mais de répondre à des aspirations partagées par plusieurs personnes. Même salariés, les membres d’une entreprise d’économie sociale ont fréquemment des attentes particulières à l’égard du travail : elles souhaitent faire un travail qui a du sens et qui leur plaît. Ces entreprises sont les outils privilégiés du développement social, local et durable ». Le reste pourra nous faire comprendre qu’il est difficile de faire un travail qui ait du sens dans une entreprise capitaliste.  

Je passe sur tout le reste ne voulant pas rendre ce courrier fastidieux mais je tiens à insister sur la publicité qui est faite tout au long de ce support de cours pour les ouvrages de Draperi ainsi que pour le magazine « Alternatives Economiques », participant à cette action et objet d’une présentation dans le document 6 relatif aux SCOP.   A la fin de la lecture de ce cours, il ressort sans nul doute que la démonstration faite à des élèves de seconde vise à salir tout ce que  l’on peut assimiler à la notion de capitalisme, valeur présentée comme inconciliable avec celle de démocratie et de la république. En réalité c’est cette démarche qui est inconciliable avec celle des principes de laïcité, supposant la neutralité de l’enseignement. Je ne suis pas seulement enseignant mais aussi parent d’élève et je n’accepte pas qu’un tel cours puisse être imposé aux élèves et à plus forte raison à mes enfants.  

Je me permettrai donc d’informer de façon la plus large sur cette opération de propagande indigne de notre école et j’attends de vous des éclaircissements au sujet de votre soutien à cette honteuse opération en rupture même avec les principes de notre école de la république, neutre et ouverte à tous.

 

Xavier Collet, le 14 mars 2005

 

Semaine anticapitaliste à l’école avec la participation du Ministère et d’Alternatives Economiques

 

La polémique sur le contenu orienté de l’enseignement des Sciences Economiques et Sociales (SES) rebondit alors même que s’est terminée la troisième édition annuelle de la semaine de la coopération dans les lycées, semaine qui a donné lieu à la distribution d’un support de cours dont la tonalité ne laisse pas de surprendre.

En témoigne notamment ce passage « Les valeurs dominantes de la société divorcent des valeurs de l'économie dominante. Les premières rejoignent plus que jamais la devise de la république : liberté, égalité, fraternité ; les secondes, au contraire, s'ancrent dans les inégalités, les exclusions et la concurrence jusqu'au conflit ».

Il importe de rappeler que cette initiative, aussi condamnable soit-elle, par sa volonté d’orienter les jeunes esprits dans nos écoles de la République, n’est pas l’initiative isolée d’un groupe d’enseignants gauchistes. Non, il s’agit d’une opération menée avec le soutien du gouvernement actuel, ministère de l’éducation et délégation interministérielle à l’innovation sociale en tête.

 Le gouvernement Raffarin dont l’on a souhaité en vain quelques réformes libérales participe donc au bourrage de crâne anticapitaliste à l’école, le gouvernement Raffarin a entériné le caractère injurieux du terme libéral. On ne s’étonnera donc pas que les promoteurs de l’antilibéralisme scolaire participent activement à cette « semaine de la coopération » et que le gouvernement patronne le support de cours rédigé par Draperi. Un support, en passant, qui se permet de présenter la SCOP « Alternatives Economiques » comme support pédagogique à une étude sur les SCOP. Que n’entendrait-on pas si Michelin sponsorisait des supports de cours dans lesquels l’entreprise serait citée en exemple ?

Frémeaux, patron d’alternatives économiques, Raffarin même combat ?

Qui aime bien châtie bien ?

Pas exactement selon Frémeaux, et c’est là que cela devient particulièrement comique.

Alors qu’un délégué interministériel se fend d’une page de soutien dans un support de propagande et ne prend aucune distance vis-à-vis  de propos imposés à nos enfants tels : « Dans ce contexte, deux horizons semblent se dessiner : soit les valeurs de l'économie ultra libérale continuent leur extension et asservissent toujours plus largement les activités sociales au règne du profit, soit, au contraire, la société se donne les moyens de limiter cette extension et tente d'élargir à l'économie les valeurs démocratiques. »   Il nous faut bien comprendre que ce délégué là, Gérard Sarracanie, serait un suppôt du patronat puisque membre d’une majorité de droite. Hé oui, dans un dossier nommé « le patronat à l’assaut des sciences économiques et sociales » publié en avril 2004 dans sa revue, Philippe Frémeaux s’en prend à l’ancien ministre de l’économie, Francis Mer, pour avoir constaté l’orientation très anti-libérale des manuels. Francis Mer se limitera d’ailleurs au constat sans oser prendre d’assaut la Bastille de l’éducation contrairement à ce que prétend Frémeaux, accusant le ministère de l’éducation de vouloir rétablir un peu d’objectivité dans l’enseignement de l’économie. Accusation fausse on l’a vu avec la promotion ministérielle de la troisième édition de la « semaine de la coopération ».

A moins que le ministère ne soit aux ordres ?

Qu’en penser ? Suffit-il au patron de la SCOP Alternatives Economiques de jouer les victimes d’une tentative de rétablissement d’une neutralité de l’enseignement des sciences économiques, c’est-à-dire d’une attaque contre leurs prés carrés de la pensée unique éducative, pour que d’un coup d’un seul le gouvernement le rassure preuves à l’appui ?

Suffit-il donc de lancer une chasse aux sorcières contre ceux qui trouvent à redire à l’orientation antilibérale de l’enseignement de l’économie pour les faire taire définitivement, et « cette volonté d’intervenir dans le contenu de l’enseignement des sciences économiques et sociales, tel qu’il est dispensé aujourd’hui. Une intervention qui bénéficie du soutien du ministère de l’Education nationale. » n’est-elle pas légitime ?

Car si même le ministère n’ose pas intervenir directement, quels sont les gardiens du contenu de cet enseignement ? Comment se fait-il que ces gens soient si intouchables, qu’il ne puisse être question de remettre en cause leurs incroyables prérogatives ? Pourquoi le gouvernement plie-t-il devant ces gardiens du culte obligatoire ? Comment Frémeaux peut-il se permettre d’accuser certains journaux , certaines associations  et sites éducatifs de mener un assaut contre les sciences économiques et sociales, les accuser de faire de la propagande ? Comment peut-il de façon indirecte exiger que les articles de son hebdomadaire antilibéral figure systématiquement dans les sujets d’examen ?

Comment peut-il faire le procès du ministère, du CNED et des Echos pour avoir organisé une « université d’automne » dont l’aspect reconquête idéologique passerait entre autre par l’invitation du commissaire européen Pascal Lamy, dont l’appartenance au parti socialiste est bien connu ... D’ailleurs le côté Reconquista n’est-il pas une façon pour Frémeaux de faire reconnaître qu’en matière de SES il est en territoire antilibéral conquis ?

Enfin comment se permet-il de parler au nom des enseignants alors qu’enseignant moi-même en SES je ne lui ai jamais accordé cette prérogative, cela voudrait-il dire que pour devenir enseignant en économie il faille en passer par les fourches caudines d’un concours impliquant l’étalage écrit puis oral d’une allégeance à certains paradigmes ?

A toutes ces questions Philippe Frémeaux et le gouvernement sont invités à répondre afin qu’élèves, parents et enseignants sachent comme en finir avec cette Bastille là.

 

        Xavier COLLET, le 10 avril 2005

Une réponse de Philippe Frémeaux

En substance, le sieur Frémeaux nous répond que nous ne serions qu'une secte (sic), ce qui je pense le dispense de donner suite à nos interrogations, on apprécie l'esprit sectaire en question ainsi que l'intérêt porté aux élèves et à leurs parents, lesquels sont enjoints à demeurer dans leur rôle de matières malléables.

La propagande n'est pas une marchandise, c'est un sévice public !

Suites à donner A partir de ce lien, vous pouvez reproduire notre lettre et à la faire suivre aux autorités (in)compétentes.

L'association SOS EDUCATION se joint à la dénonciation de ce scandale, vous pouvez aussi contribuer à notre action en écrivant à la délégation interministérielle ou en travaillant avec nous sur la durée à partir de la liste de discussion "Enseignement Libre", vous pouvez vous y inscrire auprès de son modérateur.