Monopole


Dans une économie capitaliste qu'est ce qui peut empêcher la formation de puissants monopoles contrôlant toute le production ?

Aucun monopole incontestable n'est possible dans une économie de marché

Une des pire bêtises proférée dans le domaine de l'économie, propagée par Karl Marx et acceptée par beaucoup de monde y compris des hommes d'affaire, est de considérer que la liberté des marchés mène à des monopoles. Alors qu'en réalité les monopoles sont impossibles dans le cadre de marchés libres.

Il faut d'abord définir correctement ce qu'est un monopole. Lorsque les gens parlent des dangers du monopole, ils font référence à ce que l'on appelle des monopoles que l'on ne peut remettre en cause, des monopoles incontestables. C'est-à-dire des monopoles pour lesquels la concurrence est interdite et donc qui permettent au monopoleur de fixer les prix les plus élevés possibles et de limiter la production afin de créer la rareté qui permet ces prix élevés.

Dans l'histoire du capitalisme américain nul n'a jamais été capable d'établir un monopole incontestable sur un marché libre. Effectivement, il n'existe qu'un seul moyen de rendre impossible toute concurrence : la loi. Tout monopole incontestable existant où que ce soit sur terre n'a pu exister que par la volonté de l'État, par des moyens légaux qui ont donné au monopoleur un privilège et qui ont interdit à tout concurrent potentiel d'apparaître. Ainsi un monopole incontestable n'est pas la conséquence du marché libre mais au contraire celle de l'intervention de l'État sur le marché.

L'État met en place des monopoles

Pendant longtemps les entreprises de réseau ont obtenu ce monopole incontestable, les États ont ainsi mis en place des monopoles énergétique la loi interdisant la fourniture de services énergétiques à toute nouvelle entreprise voulant concurrencer le monopoleur. Ce fut aussi le cas aux États-Unis, de même pour la fourniture de services de téléphonie. Lors de la Seconde Guerre Mondiale, le gouvernement américain ordonna même aux deux compagnies de télégraphie : Western Union et Postal Telegraph de fusionner en un seul monopole. A la fin du dix-neuvième siècle, alors que l'Amérique possédait une économie plus libérale, de nombreux entrepreneurs tentèrent de s'imposer comme des monopoles en fermant leur marché pour imposer leurs tarifs. Toutes ces tentatives échouèrent et les apprenti-monopoleurs durent renoncer à leurs ambitions ou faire faillite. Ce ne sont pas des lois anti-monopole qui les mirent en échec, mais tout simplement le marché.

La question que l'on pose souvent est la suivante : qu'est ce qui se passerait si une grosse compagnie rachetait tous ses concurrents ou les éliminait en pratiquant de la vente à perte, ne pourrait-elle pas alors contrôler son marché et imposer ses prix sans faire d'effort sur la qualité de ses produits ? La réponse est : non, elle ne le pourrait pas. Si une compagnie se met à vendre à perte pour lessiver ses concurrents et se met ensuite à gonfler ses prix pour compenser ce qu'elle a perdu, elle ne ferait qu'envoyer un message à de nouveaux concurrents potentiels qui profiteraient des nouvelles marges de profit possible sur ce marché. Les nouveaux concurrents se feraient une place en vendant moins cher et ramèneraient les prix vers leur niveau de marché. La grosse compagnie ne pourrait maintenir ses prix de monopole, elle irait droit à la faillite.

(...) Considérant un incident bien connu de l'histoire de l'automobile aux États-Unis. Le modèle T d'Henry Ford a un moment détenu une part gigantesque du marché automobile, mais lorsque l'entreprise Ford s'est refusé à faire des changements stylistiques : "Vous pouvez obtenir le modèle T dans toutes les couleurs que vous voulez, à condition que ce soit le noir", General Motors avec sa Chevrolet a pris une partie importante du marché de Ford. Ford a donc dû innover pour se maintenir face à la concurrence. On retrouve d'ailleurs une telle dynamique dans presque toutes les industries.

Aucune position économique n'est acquise à moins que l'État n'intervienne

Maintenant sur un marché libre un monopole reste possible mais il sera contestable, c'est-à-dire que le monopoleur pourra à tout moment être confronté à une concurrence et sa politique en matière de prix et de production devra en tenir compte. Il n'y a donc rien de condamnable dans un tel monopole. Par exemple s'il n'y a qu'une seule épicerie dans un village dont le gérant gagne suffisamment pour vivre chichement, on pourra dire que cet épicier détient un monopole dans son villageille. Seulement nul ne parle d'un monopole dans un tel contexte, il n'y aurait tout simplement pas de place pour un deuxième épicier vivant de son métier. Admettons que le village devienne ville, notre épicier ne pourrait pas empêcher la concurrence d'apparaître, de nouveaux épiciers pourront s'installer pour satisfaire une population s'accroissant.

On pense souvent que le secteur minier est monopolistique étant donné que les ressources minières existent en quantités limitées et qu'un petit nombre d'exploitant pourrait contrôler l'ensemble des gisements. Mais si l'on se penche sur l'"International Nickel of Canada" qui produit plus des deux tiers de nickel dans le monde on vérifiera que cette société n'impose pas des prix de monopole, le prix du nickel ne serait probablement pas plus faible si la concurrence était importante et en réalité la concurrence est importante. Le nickel pour certaines variétés et dans ses applications industrielles connaît des métaux qui lui sont substituables comme l'aluminium. Ce qui démontre bien que rares sont les produits ou matériaux indispensables à une économie quelques soient leur prix, il suffirait donc qu'un prix se mette à bondir pour que l'on cherche des produits substituables. Par exemple l'augmentation du prix du charbon a entraîné la substitution du gaz et du pétrole dans de nombreuses industries.

Mais si une entreprise réussit tout de même a obtenir un monopole contestable. Si elle obtient toute la clientèle dans tel ou tel domaine sans l'aide de l'État mais seulement grâce à sa forte productivité lui permettant de maintenir ses coûts à un faible niveau et/ou d'offrir de meilleurs produits que ses concurrents potentiels, alors il n'y a aucune raison de condamner un tel monopole. Au contraire une société qui atteint de tels résultats est digne d'estime et nul ne peut moralement exiger le droit d'obtenir une part de son marché sans être capable de faire preuve des mêmes efforts de productivité. En effet pourquoi des consommateurs devraient-ils acheter des produits de plus faible qualité à des prix supérieurs et permettre à des entreprises peu compétitives de rester sur le marché ?

Le marché récompense l'utilité sociale

Sur un marché libre tout homme ou toute société qui est capable de faire mieux que les autres est libre de le faire, c'est ainsi que le marché récompense ceux qui sont capables de travailler au bénéfice des autres. Les opposants au marché libre citent pourtant cette histoire du vieil épicier poussé à la faillite par les grands magasins. Que veulent-ils signifier par là ? Les habitants du quartier doivent-ils continuer à faire leurs courses chez le vieil épicier même si le supermarché vend des produits de meilleure qualité moins chers et leur permet ainsi d'économiser de l'argent. Ainsi les consommateurs et le supermarché seraient pénalisés au profit du vieil épicier, mais de quel droit ? Si l'épicier ne peut soutenir la concurrence alors il n'a d'autre choix que d'aller s'installer ailleurs, de faire autre chose ou de chercher un emploi auprès du supermarché. Le capitalisme par nature implique des évolutions constantes, du mouvement, il n'y existe pas de droits acquis. (...)

 

Nathaniel BRANDEN in "Common fallacies about capitalism", juin 1962

Questions

1. Quelle différence faîtes vous entre des prix de monopole et des prix de marché ?
2. Expliquez la phrase soulignée.
3. Quelle est l'influence des produits substituables sur les monopoles ?
4. Nathaniel Branden énonce que "rare sont les produits indispensables à une économie quelques soient leur prix", ceci s'applique-t-il aussi à l'essence ?
5. Quels rapports établissez-vous entre le prix, la qualité des produits et la productivité de l'entreprise qui les fabrique ?