CHAPITRE 6
NOUS PROTÉGER JUSQU'À NOUS TUER

En allant jusqu'à nous agresser afin que nous ne puissions faire usage de substances dangereuses, les autorités nous interdisent l'usage de drogues qui pourraient nous sauver .

Les effets pervers de la protection du consommateur

Si un membre de notre famille souffrait d'une maladie en phase terminale, nous réagirions mal au fait que Georges, notre fameux voisin nous empêche d'avoir accès à des traitements qui pourrait le (ou la) sauver. Après tour si c'était justement notre voisin qui souffrait d'une telle affliction nous n'irions pas lui arracher ce remède qui pourrait éventuellement le sauver. En tant qu'individu nous laissons nos voisins libres de leur choix, si nous pensons que lesdits choix sont erronés nous nous contentons de les éclairer de nos conseils, rien de plus. Nous les laissons au final décider pour eux-mêmes dans la mesure où c'est leur santé qui est en jeu.

Au sein de notre communauté et de notre pays nous n'agissons pourtant pas de la même façon. Non, nous appuyons des législations dont les effets sont de rendre inaccessibles certaines médications ou traitements à des patients en phase terminale, cela au nom de la protection du consommateur. Nous redoutons que les firmes pharmaceutiques à la recherche du profit nous vendent des produits nocifs juste pour se faire un peu plus d'argent. En conséquence nous nous sentons autorisés, par la force des armes si nécessaire, d'interdire la fabrication de médicaments non autorisés à la mise sur le marché par les instances de régulation. Avant l'autorisation notre voisin ne pourra se fournir légalement quelque soit la nature désespérée de son cas. Nous ne lui laissons pas le libre choix, mais laissons des bureaucrates décider de ce que George pourra faire ou ne pas faire. Et si ils décident mal, ils n'en supporteront pas la responsabilité.

Les résultats de notre agression sont écoeurants

Lorsque Thomas Navarro, un enfant de 4 ans, développa un méduloblastome, une sorte de tumeur maligne au cerveau, ses parents furent avertis des fréquents effets secondaires de la chimiothérapie et des radiations, lesquels étaient potentiellement mortels. Lorsqu'ils exprimèrent le désir d'avoir recours à une thérapie plus douce telle que l'antinéoplaste, les médecins menacèrent de soustraire Thomas à ses parents pour le remettre à la garde de l'État. Les Navarros renoncèrent finalement mais la chimiothérapie eu de très lourdes conséquences pour Thomas si bien qu'en dépit des protestations des médecins les Navarros refusèrent la poursuite des traitements. Lorsqu'ils contactèrent le docteur Stanislaw Burzynski pour un protocole de soin base sur la thérapie de l'antinéoplaste ils se heurtèrent à la réglementation relative aux produits prohibés (réglementation qui est, aux Etats-Unis, de la compétence de la Food and Drug Administration. Si bien qu'aucun nouveau traitement de la sorte ne pouvait être légalement administré à Thomas avant qu'il en ait fini avec la chimiothérapie et les rayons. Les Navarros se tournèrent donc vers la plus haute autorité législative afin de plaider pour leur fils, tout comme le firent d'autres patients du docteur Burzynski lors des 20 dernières années. Après un combat de procédure d'un an et demi et alors que l'espérance de vie de Thomas se limitait à deux semaines, la Food and Drug Administration (FDA) accorda l'autorisation de choix d'une thérapie alternative. A ce moment là le petit Thomas avait développé de nouvelles tumeurs appelées sarcomes leptoméningé, des effets secondaires reconnus de la chimiothérapie. La thérapie de l'aninéoplaste permis la survie de Thomas pour quelques mois (1). Combien de temps en plus aurait-il pu vivre si nous avions accepté le choix de ses parents ?

Bien sûr les Etats-Unis ne sont pas le seul endroit dans le monde où les enfants souffrent de notre choix en faveur de mesures agressives. En Afrique du Sud, où plus de 20 % des femmes enceintes sont séropositives, le fabricant du médicament nevirapine offrit de le distribuer gratuitement. La nevirapine avait déjà utilisée dans de nombreux pays afin de bloquer la transmission du virus HIV de la mère à l'enfant avec un taux de réussite de 50 %. Pourtant le ministère de la santé sud-africain déclara que ce médicament n'avait pas fait la preuve de son innocuité et que sa distribution serait donc limitée. Les bénévoles dans la lutte contre le sida ainsi que les médecins attaquèrent cette décision, ils obtinrent gain de cause mais dans l'intervalle 40 000 bébés sud-africains n'ont pu bénéficier de ce médicament.

En 1994, l'Inde fut touchée par une épidémie de peste pulmonaire et bubonique. Des médecins sur place firent appel aux laboratoires Greer en Caroline du Nord afin de se procurer des vaccins contre la peste, mais ils ne les obtinrent pas. En effet, les laboratoires Greer ont obtenu de la FDA le droit de produire des vaccins en 1992, mais la FDA a exigé que l'ensemble des produits Greer soient testés à nouveau afin de garantir le maintien de la qualité des vaccins et médicaments suite au changement de leur lieu de production. Pourtant des jugements de procès avec l'armée américaine avaient montré que les vaccins Greer étaient sûrs et efficaces, ce qui ne leur a pourtant pas valu l'approbation de la FDA. Greer possédait le seul stock commercial disponible sur le marché puisque ce vaccin était peu produit car faiblement demandé. Ce stock était néanmoins suffisant pour immuniser 280 000 personnes, mais ne pouvant être écoulé sur le marché américain faute d'autorisation, il trouva un débouché auprès de l'Organisation Mondiale de la Santé, de l'UNICEF et de multinationales souhaitant protéger leurs personnels humanitaires et leurs employés en Inde (3).

Avec la meilleure des intentions, nous en avons appelé aux normes pharmaceutiques pour nous protéger nous et nos proches. Mais en usant de l'agression en tant que moyen nous avons mis en danger les objectifs qui étaient initialement les nôtres.

L'autorégulation du marché : respecter le choix d'autrui

Notre agression se fonde sur cette croyance qui est la nôtre selon laquelle le marché n'est pas capable de nous protéger de laboratoires pharmaceutiques peu scrupuleux. Mais les réglementations sont-elles indispensables ? Observons ce qui s'est passé aux Etats-Unis lorsque le peuple était libre de choisir.

vant la loi de 1938 réglementant la vente d'aliments, de médicaments et de cosmétiques, la plus grande partie des laboratoires faisaient passer une batterie de tests à leurs médicaments avant de les vendre. Un produit qui tuait ses consommateurs tuait aussi les profits dans la mesure où les consommateurs se fiaient à des appellations qui avaient fait leurs preuves. C'est donc la recherche du profit qui protégeait le mieux ces consommateurs.

Les fabricants précautionneux obtinrent la faveur de leur public et augmentèrent leurs profits en donnant une image de marque sûre à leurs produits et en annonçant : " Nous n'avons jamais connu le moindre cas de mort subite suite à l'utilisation de notre médicament ". D'autres insistèrent sur le fait que leurs produits aient été testés et approuvés par de nombreux organismes testeurs (4). La fidélité à une marque de médicament récompensa les fabricants capables de tenir leurs promesses, ainsi, la plupart du temps les laboratoires pharmaceutiques récoltèrent ce qu'ils avaient semé. Quant aux fabricants de médicaments discutables leur nombre restreint de consommateurs ne leur permit pas de se faire une place sur le marché (5).

Jusqu'en 1938 les Américains purent réaliser leurs propres choix ou décider de leur médication suivant les conseils de leur médecin ou de leur pharmacien. Afin d'aider les consommateurs et les médecins à évaluer les différents médicaments sur le marché, plusieurs groupes dont l'American Medical Association et le Consumers' Research, mirent en place leurs propres tests. Les médecins et les pharmaciens publièrent leurs évaluations dans différentes publications commerciales (6), dans des livres (7) et des magazines tels que le Ladies'Home Journal (le journal du foyer) et Collier's (8). Ils y mirent en garde les lecteurs contre les dangers de médicaments particuliers.

Dès 1904 la Fédération des Clubs Féminins envoya des milliers de lettres, organisa des conférences et distribua des prospectus afin d'informer le public sur les effets pervers de certains médicaments (9). Ainsi, alors même que l'industrie pharmaceutique en était à ses balbutiements, le marché suffisait à protéger et à informer le consommateur. Avec l'assistance d'organisme indépendant d'évaluation les consommateurs pouvaient réaliser leurs propres choix au sujet des médecines à utiliser et ils laissaient également leur prochain décider de ce qui leur convenait.

Et les effets pervers ?

Bien des effets indésirables s'étant produits lors du début de la médecine moderne étaient les fruits du manque de connaissances (10). Les expériences sur les animaux ne pouvaient pas nécessairement détecter les effets toxiques de certains médicaments sur les humains (11). Certains groupes de patients réagissaient davantage à telle ou telle substance pour des questions d'héritage génétique (12). La liste des effets indésirables pouvait être importante sans que l'on puisse en cerner précisément l'origine. Mais ces effets sont bien dû à des lacunes dans la connaissance médicale et non à la négligence des fabricants.

Pourtant des exceptions pouvaient s'avérer tragiques comme dans le cas de l'élixir Sulfanilamide. Celui-ci contenait un principe actif non toxique mais qui s'avérait mortel si il était dissout dans une certaine solution. L'élixir dans sa solution ne fut pas testé avant sa commercialisation en 1937. 107 personnes en moururent et le pharmacien qui avait créé la préparation dans la solution mortelle se suicida (13). Mais comment aurait-on pu éviter une telle tragédie ? Et que doit-on faire pour empêcher qu'elle ne se reproduise ?

L'évaluation par une tierce partie protége les consommateurs

L'affaire de l'élixir Sulfanilamide démontre l'importance de l'évaluation des médicaments par une tierce partie. L'AMA n'avait pas encore testé l'élixir Sulfanilamide et donc pas émis son approbation (14).

Si le marché n'avait pas subi l'agression réglementaire, l'AMA et d'autres organismes de certification indépendants aurait pu étendre leurs activités dans le sillage de la tragédie de l'élixir Sulfanilamide. Les laboratoires les plus consciencieux se seraient empressés de payer leurs services afin de bénéficier des certificats de qualités propres à rassurer les clients et à doper les ventes. Les patients en consultation auraient été leurs premiers alliés puisqu'ils auraient demandé à ce que les meilleurs médicaments leur soient prescrits.

L'agression perturbe le fonctionnement du marché

Malheureusement les Américains ont pris un autre chemin. Ils ont essayé de mettre fin aux agressions en devenant eux-mêmes agresseurs. En agissant de la sorte, ils ont trouvé un remède pire que le mal.

En 1938, la loi fédérale relative aux produits alimentaires, aux médicaments et aux cosmétiques imposa aux fabricants de faire la preuve de l'innocuité de leurs produits auprès de la FDA avant d'obtenir l'autorisation de mise sur le marché (15). A la différence des organismes de certification, la FDA ne diligente aucuns tests. Elle ne fait qu'examiner les tests réalisés par les fabricants sur leurs propres produits. Évidemment nul ne pourra acquérir un nouveau médicament avant l'autorisation de la FDA, aussi vital soit-il.

Progressivement la FDA s'est mise à exiger une batterie de tests de plus en plus poussés éliminant ainsi les petits laboratoires qui n'avaient pas les moyens de s'acquitter des frais supplémentaires induits, le choix des patients en a été encore réduit. Notre société n'est plus basée sur la liberté de choix de chacun, à la place elle a introduit l'agression afin de forcer les autres à " agir pour leur propre bien ". Alors que le nombre de tests à réaliser devenait de plus en plus important, le temps passé à les réaliser s'accrut également. Comme pour toute mise en pace de restrictions normatives, la disponibilité de nouveaux produits en a souffert.

La tragédie de la thalidomide nous a induit en erreur

Dans les années 60 un nouveau médicament a fait son apparition chez les pharmaciens américains, et ceci bien longtemps après que ce médicament fut mis en vente libre à l'étranger. Quelquefois ce retard permettait aux Américains d'être protégés contre les effets indésirables que d'autres expérimentaient à leur place.

La thalidomide, par exemple, fut prescrite en Europe en tant que sédatif alors que ses fabricants attendaient l'autorisation de la vendre aux Etats-Unis. La thalidomide était moins dangereuse pour les adultes que ne l'étaient les barbituriques, lesquels tuent chaque année des centaines de personnes lors d'overdoses accidentelles.

A cette époque la sensibilité des foetus aux médicaments n'était pas clairement évaluée, c'est pourquoi des médecins prescrirent de la thalidomide à des femmes enceintes. Cependant la thalidomide génère des troubles de développement des bras et des jambes pour les fœtus humains et ceux des singes (16). Mais les tests ont été menés sur des animaux standard tels que les rats et les chiens, le produit semblait alors inoffensif. Malheureusement pour les bébés humains il ne l'était pas. Près de 12 000 enfants européens naquirent avec des membres atrophiés (17). Peu de bébés américains furent touchés car seuls quelques rares échantillons de thalidomide furent distribués aux Etats-Unis. Les médecins de la FDA qui avaient repoussé leur approbation à ce produit furent récompensés et médaillés (18).

Alors que d'autres pays n'ont pas substantiellement modifié leur législation suite à la tragédie de la thalidomide, le Congrès a donné à la FDA l'autorisation de durcir ses mesures agressives. Pour la première fois les fabricants ont du étendre leurs batteries de test auprès de leurs cobayes humains afin de démontrer que leurs médicaments étaient efficace aussi bien qu'inoffensifs (19).

En fait les laboratoires avaient déjà mené ces tests mais pas précisément de la façon exacte qu'exigeait le FDA. Des études plus longues et plus vastes devaient être entreprises. Les tests précédemment réalisés à l'étranger n'étaient pas pris en considération, ce qui obligea à réaliser les mêmes tests sur le sol américain. Pendant ce temps là, les laboratoires devaient refuser de délivrer leurs produits à des malades en phase terminale.

Ces essais supplémentaires ont-ils protégé les Américains de médicaments simplement inefficaces ? Même pas ! Des études ont montré que les ventes de médicaments à l'efficacité douteuse n'avait pas baissé depuis la réforme de 1962 (20). Évidemment, les patients comme les médecins sont habituellement capables de dire si un médicament fonctionne et cesseraient de l'utiliser si ils ne répondaient pas à leurs vœux.

Les laboratoires ne font des profits que si leurs médicaments tiennent leurs promesses, c'est là le principe de fonctionnement du marché et toute nouvelle loi ne serait que superflue et nuisible. Ces encombrantes nouvelles règles ne nous ont pas offerte de meilleurs médicaments, elles ont seulement continué à empêcher les malades dont le temps est compté d'avoir accès à des médicaments qui auraient pu les sauver.

Les conséquences morbides de la réglementation

Alors que les Britanniques pouvaient profiter de nouveaux médicaments, ils demeuraient des années plus tard en grande partie indisponibles pour les Américains (21). Le propranolol est un de ces nouveaux médicaments qui arriva si tard sur le marché américain, il s'agit du premier béta-bloquant utilisé dans le traitement de l'angine et de l'hypertension. Dans l'intervalle de 3 ans entre son introduction au Royaume-Uni et aux Etats-Unis près de 30 000 Américains décédèrent prématurément (22) faute de pouvoir se procurer le propanolol.

Même lorsque ce médicament devint disponible en 1968, il ne fut prescrit que dans des cas très précis : vanter ses mérites pour soigner l'angine ou l'hypertension demeura illégal jusqu'en 1973, d'autres Américains moururent donc faute de se l'être fait prescrire.

La FDA fut-elle remerciée pour finalement approuver l'utilisation du propanolol ? Pas du tout ? Le FDA fut critiqué par un comité de membres du Congrès pour avoir exposé le public aux effets indésirables potentiels de ce médicament ! (23) Dans la mesure où chaque principe actif peut avoir des effets différents sur les personnes, demander à la FDA de n'approuver que des médicaments sans dangers revient à lui demander de n'en approuver aucun !!!

En conséquence de cela, le temps passé avant l'approbation s'allonge considérablement, même lorsque le médicament possède un intérêt capital. Par exemple, en 1980, un des responsables d'équipe de la FDA, le docteur Henry Miller, a recommandé l'approbation d'insuline humain recombiné 4 mois après que le fabricant en ait fournir les données techniques. À cette époque la FDA prenait en moyenne 2 an et demi pour remettre son approbation. En conséquence le responsable du docteur Miller hésita à rendre aussi rapidement un verdict favorable à ce procédé vital pour les diabétiques. Il craignait que de potentiels dommages imprévisibles mettent en danger la crédibilité de l'agence gouvernementale surtout après une approbation aussi prompte. Heureusement pour les diabétiques, le docteur Miller su convaincre ses supérieurs (24).

Nous devrions peut être prêter attention à cet adage : " fais bien attention à ce que tu souhaites car tu pourrais bien l'obtenir ! " Nous avons chargé la FDA d'une mission impossible en lui réclamant la sécurité totale - et nous le payons de nos vies.

Alors que la plupart des nouveaux médicaments sont découverts aux Etats-Unis, les européens y ont accès les premiers à cause du décalage de mise sur le marché dont la FDA est la cause. Par exemple, au milieu des années 80, 72 % des nouveaux produits approuvés par la FDA ont été disponibles en moyenne 5,5 ans partout ailleurs (25).

Il apparaît clairement que, comme toutes les réglementations, celles s'appliquant au domaine pharmaceutique ont créé un manque de nouveaux médicaments. En conséquence, 60 à 80 % des médecins américains sondés, ont déclaré que la lenteur de la FDA a porté préjudice à leur capacité de traiter correctement leurs patients (26). Les pays européens ont aussi leurs instances de normalisation médicale oeuvrant au retard de mise sur le marché. Les instances suédoise et norvégienne possèdent de longs délais d'habilitation contrairement aux instances allemandes et britanniques (27).

Comment le retard de mise sur le marché a nuit aux victimes du SIDA

Les malades du sida sont particulièrement sensibilisés aux délais de disponibilité des nouvelles thérapies. En effet, ils ne peuvent pas attendre les années nécessaires à la fin de la période de test . Ils choisissent souvent de se rendre dans les pays où des traitements non encore approuvés par la FDA sont disponibles (par exemple le ribavirin (28) et l'isoprinosine (29)). Mais à leur retour il arrivait que des douaniers leur confisquent leurs médicaments (30), ce qui révèle d'ailleurs la véritable nature de l'agression réglementaire. C'est la mise en place de la normalisation qui a privé des malades du produit qui pouvait les maintenir en vie.

A la suite des protestations de la communauté des malades du sida, l'ancien responsable de la commission de la FDA, Frank Young, a accordé des dispenses individuelles pour l'importation de petites quantités de ces medicaments disponibles à l'étranger (31). Les successeurs n'ont pas tous partagé sa compassion et ont sporadiquement réclamé la saisie en douane des médicaments (32).

Quelques malades du sida et du cancer ainsi condamnés à mort ont créé une coopérative d'achat afin de se procurer illégalement ces produits auprès de laboratoires hors la loi (33). Un militant de la lutte anti-sida a demandé publiquement à ce que plus de ddc (un remède anti-sida dans sa première phase de test) de contrebande soit vendu aux malades afin que ce médicament connaisse une diffusion plus étendue que celle nécessaire aux seuls tests menées sur des patients-cobayes dans des études cliniques autorisées par la FDA (34).

Lorsque la réglementation met des vies en danger, les gens se tournent vers les marchés parallèles. Évidemment les médicaments obtenus sur le marché noir sont moins sûrs que ceux vendus directement par des firmes pharmaceutiques, mais la FDA n'a pas laissé le choix aux malades.

Si la FDA avait fait fermé les coopératives illégales d'acheteurs, les clameurs de la communauté des malades du sida et de leurs amis auraient déclenché une tempête politique et mis en évidence les effets délétères de la réglementation. C'est la raison pour laquelle la FDA a préféré ne rien voir.

La disponibilité tardive des remèdes tue plus de personnes qu'elle n'en sauve

Les réglementations de la FDA ont deux effets opposés. Retarder la mise sur le marché en attendant de voir les effets indésirables des médicaments commercialisés ailleurs dans le monde est une attitude prudente capable de sauver des vies. Par contre ne bénéficier de ces remèdes que des années après les autres signifie que certaines vies pouvant être sauvées ont été sacrifiées au nom d'un principe de précaution. Les vies sauvées compensent-elles les vies perdues ?

D'après une étude menée sur un horizon de 30 ans, pour chaque Américain sauvé par le retard de mise sur le marché entre 64 et 364 autres l'ont payé de leur vie. Dis d'une autre façon, entre 1950 et 1980 33 Américains furent sauvés par les réglementations de la FDA alors qu'entre 2 100 et 12 000 Américains en moururent (35). Étant donné que les progrès scientifiques en matière médicale ont été nombreux depuis 1980, le tribut en vie payé à la FDA a certainement augmenté. Notre agression réglementaire, aussi bien intentionnée soit-elle est meurtrière. Ce sont nos précautions qui nous tuent !

Dans notre économie mondialisée les réglementations américaines menacent aussi les autres pays. Lorsque Robert Gallo, le célèbre chercheur de la lutte anti-sida, développa un test sanguin de dépistage du virus HIV, la FDA mis des mois avant de délivrer son approbation. Le docteur Gallo argumenta avec raison que le test devait être utilisé sur le champ afin d'assurer l'innocuité des stocks de sang disponibles, ajoutant que même un test imparfait valait mieux que pas de test du tout. La FDA demeura inflexible.

Pendant ce temps le Japon continua à importer des stocks de sang américain pour les hémophiles. Dans le trimestre consécutif au refus de la mise en place du test Gallo sur le sang le taux de contamination au virus HIV grimpa de 0 à 13 % au Japon (36).

Il augmenta aussi de façon dramatique aux Etats-Unis. De plus le délai d'approbation de 5 ans par la FDA a repoussé l'utilisation du test portatif de dépistage HIV, lequel aurait pu permettre aux malades infectés de connaître leur maladie. Près de 10 000 Américains furent infectés pour la seule et simple raison que leurs partenaires n'étaient pas au courant de leur capacité de contamination (31).

Plus de règlements c'est moins de sécurité

Comme nous l'avons déjà vu, le délai de mise sur le marché de nouveaux médicaments tue plus de gens qu'il n'en sauve. En outre, les produits qui passent entre les mailles du filet sont moins sûrs que ceux qui étaient approuvés il y a quelques années. Alors qu'aux Etats-Unis entre 1964 et 1983, 2 % seulement des nouveaux médicaments furent retirés du marché pour effets indésirables, on en dénombrait 3 à 4 % en Espagne, en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis entre 1974 et 1993 (38). Nos médicaments pourraient donc être moins fiables qu'autrefois, peut-être à cause des restrictions que met la FDA sur l'utilisation des médicaments "hors notice".

La FDA approuve des produits en fonction d'indications spécifiques. De nouvelles propriétés de ces médicaments sont considérés "hors notice" tant que la FDA n'a pas testé ces indications. Bien que les médecins puissent légalement prescrire des médicaments pour des indications hors notice, les laboratoires n'ont pas le droit d'informer le corps médical des utilisations possibles non mentionnées. Il faudra donc, pour que ces mentions apparaissent enfin dans les indications du produit, que de longues et coûteuses études supplémentaires soient réalisées (39). En attendant, le brevet déposé sur le médicament peut expirer, ne permettant pas d'amortir les coûts de recherches et d'études supplémentaires. Les fabricants préféreront donc souvent développer de nouveaux produits pour bénéficier de la durée d'un nouveau brevet, plutôt que d'obtenir un élargissement des indications d'anciens médicaments qui ont pourtant fait preuve de leur sécurité. Comme les composants de médicaments de la prochaine génération auront aussi des effets indésirables non découverts avant leur commercialisation, nous sommes exposés à des risques additionnels.

Même si les laboratoires peuvent se permettre de demander des autorisations pour toutes ces nouvelles indications, les possibilités d'usage non inscrits sur les notices sont si nombreuses que la FDA n'aurait pas le temps nécessaires pour rendre tous les verdicts qui sont attendus (40) ! Presque 40 % de toutes les prescriptions pour des usages hors notice (41), sont réalisées sans que les laboratoires ait donné la moindre information. En conséquence, trois médecins sur quatre pensent que la politique de la FDA leur complique cette tâche qui consiste à connaître de nouveaux usages pour d'anciens médicaments (42).

Une aspirine tous les jours vaut un bon médecin

Quelques uns des nouveaux usages dont les médecins pourraient ne pas avoir entendu parler peuvent faire la différence entre la vie et la mort. Par exemple, une étude menée en continu par plus de 22 000 médecins a fait la démonstration que la prise quotidienne d'aspirine réduit le risque d'attaque cardiaque de 44 % chez les hommes de plus de 50 ans (43). Bien que l'étude devait être menée sur 10 ans, les chercheurs en ont annoncé les résultats en 1989, après seulement 5 années d'expérimentation. Cette découverte était jugée si importante que les médecins ont pensé que continuer à administrer un placebo alors que l'aspirine sauve des vies serait une attitude contraire à l'éthique.

Les laboratoires Bayer ont alors mis sur le marché des cures d'aspirine adaptés aux besoins d'une prévention cardiaque. Mais la FDA a interdit à Bayer de mentionner cette thérapie dans ses publicités la simple mention " pour patients en cure d'aspirine sur prescription médicale " (44), de peur que de telles mentions puisse " encourager l'automédication au risque de conséquences cardiaques néfaste " (45). Bien que l'aspirine, comme tout autre médicament, possède des effets secondaires indésirables chez certaines personnes, beaucoup d'autres en tirent des effets favorables dans la mesure où les maladies cardio-vasculaires sont la première cause de mortalité aux Etats-Unis. En 1995, une étude a estimé qu'un tiers de la population exposée aux risques cardiaques était dans l'ignorance de l'aide que pourrait leur apporter une cure d'aspirine (46).

Les pauvres, qui ne consultent pas régulièrement un médecin, sont particulièrement touchés par la décision de la FDA. Ils étaient les derniers à apprendre comment avoir accès aux cures d'aspirine car la publicité est la source principale d'information des faibles revenus (47).

Nous aurions pu prendre conscience des bénéfices de l'aspirine dès le début des années 70. Les laboratoires Squibb avait lancé un protocole de recherche en 1969, mais les exigences de la FDA les en avait découragé (48).

Puisque les maladies cardiovasculaires sont la première cause de décès aux Etats-Unis, De 10 000 (49) à 100 000 personnes décèdent inutilement chaque année pour la simple raison que la FDA a interdit la publicité pour l'aspirine. Pour chaque personne tuée par le retard de mise sur le marché, d'autres mourront en conséquence d'une simple décision bureaucratique (51) !

Le FDA crée la version américaine de la Thalidomide

Même des substances non brevetables telles que les vitamines ou encore les minéraux, ne peuvent pas être vendues avant que les fabricants n'en passent par de longues et coûteuses expérimentations. Cependant, en 1992, le Centre pour de Prévention et de Contrôle des Maladies (CDC) a recommandé que toutes les femmes en âge de procréer prennent des suppléments en acide folique, dont l'absorption s'est révélée efficace contre l'incidence de malformations foetales telles que le spina bifida (52). La FDA a réagit immédiatement en avertissant les laboratoires commercialisant l'acide folique qu'elle n'hésiterait pas à les poursuivre si ils osaient faire leur publicité à partir des recommandations du CDC ! (53)

Aux Etats-Unis, approximativement 2 500 enfants naissent avec des malformations qui auraient pu être évité par la prise d'acide folique. Plusieurs milliers subissent un avortement lors que ces défauts sont révélés par échographie. Si la FDA ne s'était pas fendue de sa menace, les publicitaires auraient pu depuis 20 ans éduquer les femmes à la prévention de tels risques. Au lieu de cela, au moins 25 000 enfants américains - plus du double de ceux qui ont été touchés par la thalidomide dans le monde - ont souffert de difformités lourdes sans aucune nécessité (54).

Les effets les plus meurtriers de la réglementation : l'absence d'innovation

Nous avons vu comment les réglementations (lois relatives aux autorisations) ont repoussé la disponibilité de produits capables de sauver des vies. Des dizaines de milliers, voire des centaines de milliers de personnes, sont décédés prématurément chaque année rien qu'aux Etats-Unis. Aussi écrasant que puisse être ce chiffre, il reste faible en comparaison des morts inutiles résultant des retards dans l'innovation, des renoncements de chercheurs qui représentent des médicaments n'ayant jamais vu le jour.

En 1836, Nathan Rothschild était probablement l'homme le plus fortuné au monde. Pourtant il décéda d'une simple infection bactérienne qui n'aura pas résister à des antibiotiques s'ils avaient été découverts (55). Les infections, premières causes de décès au début des années 1900, ont été vaincues grâce à ces remèdes miracles qui ne coûtent que quelques dollars. Dans le futur ce seront les maladies cardio-vasculaires et les cancers qui pourront être soigné à des prix abordables pour tous.

On peut mettre au crédit des innovations en matière de traitement et de prévention la hausse de l'espérance de vie de vingt à trente ans au cours du vingtième siècle (56). Tout ce qui fait obstacle à de telles innovations a un impact désastreux sur notre santé, et cela nous le devons aux réglementations.

En tant que chercheuse dans une major pharmaceutique, j'ai été directement confrontée aux règlements de la FDA. Une partie de mes travaux avait trait à la prostaglandine naturelle ou à sa forme synthétique dans ses effets contre les maladies alcooliques du foie (57). Plus de 100 000 Américains meurent chaque année de cirrhoses du foie et la prescription tout à fait inefficace donnée pour cette maladie est l'alitement et l'abstinence alcoolique.

Même un seul verre d'alcool peut causer des dommages au foie, la plupart des gens s'en remettent sans problème, mais ce n'est pas le cas pour tous alors qu'il suffirait d'additionner de la prostaglandine à un verre d'alcool pour que ses dégâts en soient largement affaiblis.

Malheureusement, les instances de la réglementation aux Etats-Unis ont déjà décidé que l'addition de vitamine B1 a des boissons alcoolisés n'était ni plus ni moins qu'une façon de les frelater (58). On peut présumer que les instances de réglementation ne voulaient pas inciter à la consommation d'alcool, mais une telle arrière pensée est sans aucun fondement.

Ainsi, lorsque les fabricants de cigarettes commencèrent à faire la promotion de produits moins dangereux, les fumeurs se mirent à prendre conscience des dangers du tabac et la consommation baissa. Lorsque la Commission Fédérale au Commerce utilisa l'interdiction pour que les fabricants de cigarettes n'informent pas sur des questions sanitaires, la consommation de cigarette reprit (59).

Si nous avions pu faire la promotion de boissons alcooliques moins dangereuses, la consommation d'alcool aurait dû faiblir avec la prise de conscience des ravages de l'alcool. Quant à ceux qui auraient continué de boire, ils l'auraient pu en limitant les risques pour leur santé. Et pourtant nous n'avons pas le droit d'ajouter directement de la prostaglandine dans l'alcool. Nous avons donc décidé d'essayer de développer une gélule de prostaglandine à la place.

Pour prouver son efficacité sur les maladies du foie nous devrions étudier des centaines de cas sur plusieurs années. Mais comme nul ne l'a jamais fait, nous n'étions pas sûrs du nombre de personnes dont nous aurions besoin pour nos tests. Si nous faisions appel à trop peu de sujets alors nous ne pouvions établir l'efficacité de nos produits qu'à 80 % au lieu du 95 % exigé par la FDA, nous devions alors recommencer tous les tests avec d'autres cobayes. Si nous n'avions pas prévu le coup la première fois, alors il devient impossible de recommencer la phase de test avant que les droits sur le produit ne viennent à expiration.

Avant que la FDA n'exige cette importante batterie de tests, les brevets ne mettaient pas en cause le développement de médicaments comme c'est le cas aujourd'hui. Désormais, l'impossibilité de conserver des droits sur le produit empêche de couvrir les frais d'investissements en recherche développement. Même sous brevet, seuls 3 des 10 médicaments qui finissent par être mis sur le marché couvrent les investissements qui leur ont été consacrés (60).

Sans la protection d'un brevet, nous n'avons aucun espoir de récupérer les coûts induits. Et même avec un brevet le risque économique est très grand et donc mes employeurs laissèrent tomber la mise sur le marché. Ennuyés, les agents de la FDA m'appelèrent pour les persuader de continuer. "Il n'y a pas d'autres traitement disponibles pour cette maladie " me rappelèrent-ils. Mais, même avec le soutien des inspecteurs de la FDA, la réglementation dissuada la mise en circulation du médicament. Il en résulta que si mon employeur perdait une source potentielle de profit, les malades du foie perdaient une occasion de survivre à leur maladie.

Effectivement, des substances actives qui terminent leur vie sur des étagères ne pourront sauver personne. Que l'on soit riche ou pauvre, nous ne pouvons nous payer des remèdes qui ne sont pas disponibles. Bien plus de gens souffrent du manque d'innovation en matière médicale que de toutes les autres prohibitions et retard de mise à disposition. Mais comme les pertes qui en résultent ne sont pas facilement apparentes, on les ignorera tout simplement.

Si les règles de la FDA avaient été introduites plus tôt, quelques innovations médicales majeures n'auraient jamais franchis le seuil de nos pharmacies. Cela aurait été le cas de l'aspirine par exemple, qui déforme les fœtus de toutes les espèces sauf ceux de l'espèce humaine (61) et qui n'aurait donc pas reçu l'aval de la FDA. La pénicilline, la digitaline et le fluroxene n'auraient pas non plus franchis le barrage (62), et des milliers de vies n'auraient pu être sauvées.

Payer plus pour en avoir moins

La perte de médicaments qui auraient pu sauver des vies est le coût le plus cher payé des réglementations. Sans médicaments, nous vivons moins longtemps, nous souffrons sans nécessité et payons plus cher le moindre traitement. Par exemple, avant que les produits antiulcéreux aient été mis en vente, presque 100 000 interventions chirurgicales durent être pratiquées chaque année pour soulager ces maux, et pour un coût moyen de $28 000. Moins d'une décennie après les traitements antiulcéreux, plus de 80 % des patients purent éviter l'opération. Ces nouveaux traitements revenaient à $ 900 par patient et quelquefois impliquaient que la cure fut renouvelée une seconde voire une troisième fois (63). Elle permettait aux ulcéreux de continuer à vivre presque normalement. De nouvelles avancées thérapeutiques permirent d'abaisser le coût du traitement à $ 140 par personne, permettant de réaliser une économie d'au moins $ 224 millions en frais de santé annuellement (64). Remplacer la chirurgie et l'hospitalisation par des médicaments est une excellente façon de faire des économies en matière de santé publique. Ce n'est que lorsque l'agression empêche la mise à disposition de nouveaux traitements que les coûts de la santé stagnent à un niveau élevé. Bien sûr les réglementations maintiennent aussi des prix prohibitifs.

Nous pouvons estimer l'impact des législations sur le prix des médicaments à partir du délai s'écoulant avant leur disponibilité pour le grand public, or ce délai est passe de deux ans et sept mois avant les réformes de 1962 (65) à plus de 14 ans dans les années 90 (66). Comme nous l'avons déjà vu, ni la sécurité ni l'efficacité ne sortirent gagnant de cette agression supplémentaire laquelle n'a permis que d'augmenter par cinq les périodes d'essai des nouveaux produits, augmentant par la même occasion les coûts d'au moins cinq fois.

Et la hausse des prix consécutive est peut être plus importante encore puisque les obligations en matière d'études cliniques, la partie la plus onéreuse des études à réaliser, furent la cause majeure de l'augmentation des délais de commercialisation. Si nous avions pris la peine de lutter contre les nouvelles obligations réglementaires de 1962, nous aurions pu aboutir à une baisse des coûts de développement et donc des prix à hauteur de 80 % sans le moins du monde compromettre la santé des patients ou l'efficacité des traitements.

Certains pays ont essayé de contrer la hausse des coûts des produits pharmaceutiques lié aux réglementations, par l'utilisation d'autres agressions encore, en l'occcurence par le contrôle des prix de détail . Le résultat en fut que les patients grecs, portugais et espagnols durent attendre trois à quatre années de plus pour obtenir ces nouveaux médicaments pendant que les compagnies pharmaceutiques négociaient avec les organismes tarifaires (67). Plus d'agression réglementaire conduit à priver des patients désespérés de remèdes vitaux.

En 2000, le coût moyen de mise sur le marché des nouveaux produits pharmaceutiques fut de plus de 800 millions de dollar (68). Avec un coût de développement si élevé pour les nouveaux médicaments, il ne faut pas s'étonner que les groupes pharmaceutiques ne s'intéressent pas aux maladies rares. L'AMA a pu estimer que 10 % de la population américaine était atteinte d'une maladie orpheline, c'est-à-dire ne touchant que quelques milliers de personnes (69). Ce qui signifie que les réglementations sont responsables du désespoir de millions de patients condamnés à ne pas être traités comme il serait possible de le faire.

Avec l'augmentation des frais de développement, les plus petits laboratoires ne peuvent plus développer le moindre nouveau produit. Un tel climat impose la fusion des laboratoires par la nécessité de dégager des économies d'échelle. L'entrée sur le marché devient donc très difficile pour de nouveaux concurrents (70). Mais sans la concurrence agressive des outsiders cherchant à se faire une place sur le marché, les grandes compagnies présentes négligent de répondre avec acuité aux besoins des clients. Ainsi le prix des médicaments grimpe en flèche, non seulement du fait des coûts faramineux imposés par la loi mais aussi du manque de pression concurrentielle.

La commission du Codex Alimentarius, création de la FAO et de l'OMS a tenté d'harmoniser l'arsenal réglementaire relatif aux alimentaires et aux produits pharmaceutiques dans le sens de normes encore plus drastiques (71). Ceci devrait se concrétiser par une augmentation continue des coûts et des délais de disponibilité des médicaments, mais aussi par un renforcement du cartel pharmaceutique.

La véritable tragédie est que les innovations médicales et thérapeutiques vont en souffrir davantage. Nous allons tous en pâtir y compris les cartels pharmaceutiques et la FDA elle-même. A titre d'illustration, je peux rappeler que l'inspecteur de la FDA qui m'a encouragé à développer l'usage de la prostaglandine dans les cas de maladies de foie, a fini par mourir de ce type de cancer. Je n'ai pu m'empêcher de me demander si ce n'était pas les règles de la FDA qui ne lui avaient pas permis d'utiliser le produit qui aurait pu le sauver.

Lorsque ceux que nous aimons succombent de maladies " incurables " nous souffrons des pires effets de notre volonté de réglementer. Nous devrions peut-être reconsidérer nos façons de faire.

Une meilleure solution

Si les réglementations causent plus de mal que de bien, comment s'assurer que les nouveaux médicaments sont efficaces et sans effets secondaires ?

La confiance en une marque favorise la qualité

Faute d'agression réglementaire, les profits à long terme des laboratoires ne seront maintenus que par le meilleur service de leurs clients. Lorsqu'un produit tient ses promesses, les clients sont satisfaits et rachètent des produits de la même marque. Par contre ils sanctionneront les médicaments peu efficaces ou dangereux en se tournant vers des marques plus réputées pour la qualité de leurs produits (72).

En effet, pourquoi laisser des laboratoires peu scrupuleux continuer à vendre comme des panacées des médicaments inefficaces ? Les fraudeurs, les escrocs devront rembourser leurs victimes comme nous le verrons dans le chapitre 13. Comme il est difficile d'estimer les dommages, la restitution intégrale des sommes prélevées pour des médicaments sans aucuns effets est la meilleure dissuasion qui soit contre les charlatans.

Les coopératives de malades offrent des informations spécialisées

Les coopératives d'achat des malades du sida que nous avions décrites se consacrent à s'informer des composants des nouveaux médicaments et enseignent à leurs clients la façon de doser les substances actives et leurs indiquent les éventuels effets indésirables. Avec deux décennies de recul, l'action de ces coopératives s'est révélée exemplaire et a même été louée par la FDA (73).

De la même façon, beaucoup d'informations sur les suppléments nutritionnels sont aujourd'hui proposés par des organisations à but lucratif et non lucratif.

Les médecins font aussi des prescriptions

La plupart d'entre nous recherchent des conseils de professionnels afin de choisir leurs médicaments. Nous n'avons ni le temps, ni les compétences pour évaluer nous-mêmes les effets de tel ou tel produit pharmaceutique, pour nous repérer entre les marques ou nous informer auprès d'associations de patients. En conséquence, nous attendons de nos médecins qu'ils nous prescrivent ce dont nous avons besoin. Comment nos médecins sauraient-ils déterminer, en l'absence de réglementations, quels produits recommander ? En dehors des sources indiquées plus haut, les médecins et les pharmaciens s'informent des nouveaux produits auprès des firmes pharmaceutiques et continueront certainement à procéder de la sorte. Sans les restrictions de la FDA, les groupes pharmaceutiques pourraient informer les praticiens des indications des nouveaux médicaments.

Mais comme les laboratoires pourraient avoir une vision faussée de leurs propres produits, l'avis d'une tierce partie est cruciale. La lettre médicale sur les substances et les thérapies, dont les ressources sont tirées des abonnements, illustre la façon selon laquelle le marché peut satisfaire de façon adéquate la demande en faveur d'une information médicale objective (74).

Une certification fiable

Actuellement la FDA se contente d'étudier des rapports remis par les grands laboratoires sans faire elle-même la moindre recherche. L'évaluation par une tierce partie, qui eu ses heures de gloire au début du vingtième siècle, pourrait revenir en force si la FDA renonçait en partie à ses règlementnts. Des organismes indépendants de certification travailleraient en étroite connection avec les laboratoires pour assurer de la sécurité et de l'efficacité des produits. Les firmes paieraient sans difficulté pour de tels services, car la certification rassurerait les consommateurs et inciterait les médecins et les pharmaciens à recommander leurs médicaments (75).

D'ailleurs, en Europe, il existe des organismes de ce type, lesquels sont payés par les laboratoires pour passer en revue les études et tests réalisés, afin, le cas échéant, de recommander une rapide mise sur le marché. Ainsi, au début des années 90, l'autoridsation de commercialisation prenait en moyenne 250 jours alors qu'elle est de 820 jours aux États-Unis (76).

Si les organismes privés de certification pouvaient inspirer confiance quant à leurs recommandations, comme ce fut le cas de l'UL en matière d'appareils électriques, pourquoi ne serait-ce pas le cas en matière médicale. L'incitation a recommander des produits peu fiables serait d'ailleurs faibles car de tels organismes ne peuvent survivre qu'en fonction de la confiance que le public leur accorde.

La pratique de la certification évolue d'ailleurs dans l'industrie des suppléments nutritifs dans la mesure où les industriels proposaient des produits ne contenant pas autant de substances actives que mentionnées dans l'étiquetage. Des organismes tels que "Good Housekeeping", "Consumer Reports", et "ConsumerLab.com" ont tous mené des tests sur les additifs nutritionnels afin d'aider les consommateurs (77). Les fabricants de suppléments alimentaires USANA Health Services adhère volontairement et revendique son adhésion à la Charte des bonnes pratiques suivie par les firmes pharmaceutiques afin d'assurer un même niveau de qualité à leur production (76). La fondation pour l'allongement de la vie utilise des laboratoires indépendants pour réaliser des tests d'évaluation de ses propres produits ainsi que des autres médicaments mis sur le marché. De plus, la fondation passe en revue toute la littérature scientifique pour informer ses clients des avantages et des risques des suppléments alimentaires (79).

La certification rend le pouvoir aux consommateurs. Chacun a la possibilité, avec l'aide de médecins qualifiés, de décider des médicaments qui lui seraient nécessaires.

Moins d'agression signifie une augmentation de la longévité

Laisser à chacun la liberté de faire ses choix a bien des avantages. La certification privée permettrait de rendre disponibles beaucoup plus rapidement de nouvelles thérapies capables de sauver des vies. Les coûts chuteraient d'au moins 80 % par la simple élimination des règlements inutiles. Dans la mesure où les nouveaux produits pharmaceutiques seront mis sur le marché sans attendre des années, les ventes permettraient d'amortir plus rapidement les coûts de la recherche et développement, ceci permettra une baisse encore plus importante des prix.

Comme de nouvelles utilisations pour les médicaments sont découvertes, les laboratoires pourraient se permettre d'informer gratuitement les médecins et les patients. La sécurité des produits serait améliorée car les composants déjà connus dont les effets ont été bien définis seraient utilisés en priorité. Les médicaments qui seraient vendus pour plus d'une seule indication seraient plus rapidement rentables, permettant ainsi des tarifs encore plus bas.

Cependant, le plus grand avantage de la dérégulation est le développement accéléré de nouvelles innovations. Quand les coûts de développement baissent, davantage de médicaments et de suppléments alimentaires deviennent sources de profits. Les traitements pour les maladies orphelines deviendraient rentables. L'innovation fleurirait nous donnons l'espoir de trouver des traitements pour des maladies encore incurables et mortelles. Une vie plus longue, une meilleure condition sanitaire sont les récompenses de la liberté de choix !

Certains prendront-ils de mauvaises décisions ? Bien sûr ! Cependant, la plupart du temps, les gens font de mauvais choix car justement le nombre de choix possibles est restreint. Par exemple une personne au stade terminal fera des choix désespérés puisqu'il n'y a aucune thérapie qui pourrait le sauver. Aujourd'hui ces malades sans espoirs se tournent vers des guérisseurs prêts à prendre leur argent même si ils n'ont aucune compétence à offrir.

Si nous mettons fin aux réglementations qui inhibent l'innovation et entravent la disponibilité des médicaments efficaces alors moins de gens se trouveront dans une situation désespérée. La seule façon de mettre fin à la charlatanerie et à l'exploitation des malades incurables est de leur donner des traitements efficaces. Rien ne le permettrait mieux qu'un marché libre de toute agression réglementaire.

En résumé …

Si un de ceux que nous aimons était en train de mourir, nous ne voudrions pas lui ôter tout espoir en lui interdisant d'user de médicaments qui pourraient le sauver. Pourtant, sans le vouloir, c'est ce que nous faisons au nom d'un principe de précaution.

Si l'objet de l'autorité de régulation des médicaments est de n'autoriser la mise sur le marché des seuls médicaments dont les effets secondaires sont néants et l'efficacité prouvée, alors aucun nouveau médicament ne peut être vendu dans le commerce.

Mais dans la mesure où les dangers de nouveaux produits médicamenteux alerte le public nous préférons donner le pouvoir de réglementer drastiquement la mise à disposition de nouvelles substances.

En conséquence, les coûts et les temps de développement des nouveaux médicaments ont été simultanément multipliés par 5 depuis le début des années soixante, sans qu'une amélioration dans leur efficacité et leur fiabilité ait été notée. Nous payons cinq fois plus cher pour les médicaments que nous ne le devrions !

Cependant le véritable coût se mesure en vies humaines perdues, celles de ceux qui sont mort savant que des produits existants et efficaces aient eu le temps d'être mis à leur disposition.

Aux États-Unis la FDA réglemente aussi les informations que les laboratoires peuvent partager avec les praticiens de la médecine. En conséquence, 10 000 à 100 000 Américains décèdent chaque année de troubles cardiaques alors qu'une prise d'aspirine régulière aurait pu l'éviter et que les fabricants d'aspirine n'ont pas le droit de lancer des campagnes de prévention. Pareillement 25 000 enfants sont nés avec des difformités qui auraient pu être prévenue par la prise d'acide folique, produit pour lequel les fabricants de vitamine n'ont pas non plus le droit de faire de la publicité.

Mais le coût le plus écrasant de la réglementation c'est l'étouffement des velléités innovatrices qui auraient pu transformer des maladies potentiellement mortelles en dérangements bénins. Les innovations médicales contribuent à la baisse drastique des coûts de la médecine. Dans les 10 années suivant son introduction, le traitement des ulcères est passé de 28 000 dollars pour une opération chirurgicale à seulement 140 dollars, une économie de 99,5 % !

Quand la certification par des organismes privés se substitue à la réglementation, les prix baissent, la sécurité s'accroît et les innovations se développent. Plus de traitements sont rendus disponible, ce qui limite les opportunités de charlatanerie.

 

 

Il n'est pas sain de placer la population dans une situation où elle doit implorer auprès d'une institution étatique le droit de prendre soin de sa propre santé.

-Samuel Broder, directeur du National Cancer Institute

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les maladies du cancer sont prêts à prendre le risqué de nouvelles therapies pour avoir une chance de survivre. Mais la FDA nous protège au point de nous tuer !

-Beverly Zakarian, survivant d'un cancer et president du Cancer Patients Action Alliance

 

 

 

 

 

 

 

La concurrence et la recherche de l'intérêt personnel sont pour les hommes d'affaires un puissant stimulant au service des intérêts des consommateurs.

-James Gwartney et Richard Stroup WHAT EVERYONE SHOULD KNOW ABOUT ECONOMICS AND PROSPERITY

 

 

 

 

 

 

 

Les Indiens souffrent de la peste, nous en possédons le vaccin dans nos entrepôts, les gens en ont besoin et les réclament mais nous ne pouvons pas les leur fournir.

-William White Jr., Président des laboratoires Greer

 

 

 

 

 

 

 

 

Plus de 1000 personnes succombent chaque année des effets de l'interaction entre barbituriques et alcool, ces vies auraient pu être sauvée si on avait prescrit de la thalidomide aux victimes en question.

Sandy Shaw co-auteur de LIFE EXTENSION: A PRACTICAL APPROACH

 

 

 

 

 

 

 … jusqu'en 1962, les pénalités imposés par le marché aux vendeurs de médicaments non efficaces ont laissé peu de champ à des améliorations par voie législative.

Sam Peltzman REGULATION OF PHARMACEUTICAL INNOVATION: THE 1962 AMENDMENTS

 

 

 

 

… il est rarement arrive, si cela est même jamais arrivé, que le Congrès réunisse une commission d'enquête au sujet d'un sujet d'un refus de la FDA de mettre sur le marché un médicament important ; mais on compte par centaine les rapports d'audition de la FDA relativement à des autorisations considérées comme non fondées… Or l'incapacité à autoriser un nouveau principe actif peut être aussi dévastatrice pour la santé publique que l'autorisation d'un médicament potentiellement dangereux.

- Alexander Schmidt, ancien membre d'une commission de la FDA

 

 

  …il n'y a qu'une façon de s'en tirer indemne - ne rien essayer. Ou prendre un maximum de temps et exiger les recherches es plus poussées.

- Un agent de la FDA

THE FREEMAN

 

… 82% de toutes les drogues biotechnologiques viennent d'Amérique, mais l'Europe en consomme 75 %.

-Dr. Robert Goldberg

INSIDER REPORT, Février 1996

 

La FDA a découvert que la thérapie thrombolytique réduisait la mort par attaque cardiaque de 18 %, mais il lui a fallu deux ans pour autoriser son application. Le résultat en fut la perte de 22 000 vies.

Noel Campbell

Département d'économie du Gordon College

 

 

 

Nous ne sommes pas preparés à mettre à sac les habitations à la manière des gestapistes pour arracher des medicaments à des malades en phase terminale .

Dr. Frank Young, ancien responsable de la commission FDA

 

 

Après 12 longues années d'affrontement contre la FDA et après les morts inutiles et prématurées d'au moins 430 000 américains, la ribavirin fut enfin approuvée en juin 1998.

LIFE EXTENSION MAGAZINE, Novembre 1998

 

 

De quel droit légal ou moral donnons nous le pouvoir à un système qui dit à un nombre faramineux de malades gravement atteints qu'ils devront attendre pour se soigner avec une nouvelle thérapie qu'une bande de mecs résidant dans un immeuble fédérale de Rockville, Maryland les y autorise.

Daniel Henniger

WALL STREET JOURNAL

 

Je ne comprends pas comment un bureaucrate de Washington peut assis sur son cul me dire ce qui est le mieux pour moi.

Terry Sutton, malade du sida

 

 

… le système américain d'autorisation de mise sur le marché, en dépit de sa sévérité et de son caractère pointilleux, n'a pas établi sa supériorité dans la prévention des risques liés à la diffusion de nouveaux médicaments.

Olav Bakke

Center for the Study of Drug Development, University of Rochester New York

 

Selon George Hitchings, co-lauréat du prix Nobel de médecine 1988, les cinq années de délai pour la commercialisation de l'antibactérien Septra, ont coûté 80 000 vies humaines.

Sam Kazman

Competitive Enterprise Institute

 

 

En l'occurrence l'absence d'informations actualisées sur l'utilisation appropriée du médicament, laquelle est impliquée dans 15 à 30 % des décès ou accidents graves liées à des réactions médicamenteuses dans les hôpitaux.

WALL STREET JOURNAL, 4 avril 1996

 

 

Si j'avais dû utiliser des medicaments dans les seuls cas prescripts et approuvés, la moitié de mes patients seraient déjà morts.

Dr. Larry Norton, oncologiste au Centre anti-cancer Sloan-Kettering

 

 

 

Les Américains meurent littéralement de réformes des lois sur les medicaments.

Henry I. Miller Directeur et fondateur du department biotechnologie de la FDA

 

 

 

 

 

 

 

… les interventions des autorités locales et fédérales en matière de recherche scientifique ont changé, elles sont passées du stade des contrôles raisonnables à l'étranglement proprement dit.

Donald Kennedy, membre de la commission FDA, 1976-1979

 

 

If even one new drug of the stature of penicillin or digitalis has been unjustifiably banished to a company's back shelf because of excessively stringent regulatory requirements, that event will have harmed more people than all the toxicity that has occurred in the history of modern drug development.

William Wardell, Professor, University of Rochester, N.Y.

 ...economic studies have been virtually unanimous... FDA regulation certainly cannot be proved "safe and effective"-thereby flunking its own approval criterion.

Dale Gieringer, Wall Street Journal

 

Si une seule substance de l'importance de la pénicilline ou de la digitaline avait dû ne jamais être accessible au public pour cause de règles trop drastiques, ceci aurait porté davantage préjudice à la population que la somme de tous les accidents liés à la mise sur le marché de médicaments dans l'histoire de la médecine.

William Wardell, professeur à l'université de Rochester, New York

 

Sir Arthur Fleming ,le découvreur de la pénicilline, a dit qu'il n'aurait pu poursuivre ses recherches si les réglementations actuelles avaient été mises en place à son époque … la pénicilline qui a sauvé tellement de vies, a permis de soulager tant de souffrances, et remis sur pied bien des gens, n'aurait jamais été découverte.

Edmund Contoski, MAKERS AND TAKERS

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Des études économiques menées aboutissent à des conclusions pratiquement unanimes … les réglementations de la FDA ne peuvent en aucun cas être considérées comme " sûres et efficaces ", la FDA ne passerait donc pas l'épreuve des tests qu'elle impose.

Dale Gieringer WALL STREET JOURNAL