L'aura du rebelle
Le
politiquement incorrect est à l’honneur, il est de bon ton de s’afficher
comme tel, cela donne une aura de rebelle, d’intellectuel en lutte et nécessairement
tourmenté. Je pense souvent à ce clip des désopilants « Inconnus »
qui parodiaient un chanteur engagé, tellement politiquement incorrect ou tout
du moins qui s’affirmait comme tel. Le courageux iconoclaste n’avait pas
peur de mettre sa carrière en danger par ses actes de résistances. En véritable
précurseur de Pierre Arditi, il énonçait des pensées fortes telles :
« la guerre c’est pas bien, il faut faire la paix », « la
pauvreté c’est moche, il faut savoir partager », il aurait pu ajouter
« la mondialisation capitaliste c’est la misère et l’exploitation ».
Que d’audace, quel culot de proférer de telles déclarations, si
inhabituelles, si scandaleuse pour la classe bien-pensante !
Mais
les politiquement incorrects sont tellement entendus, ils réussissent à
grappiller quelques tribunes et même à faire la une du si « politiquement
incorrect » Marianne, arf, arf. Dans son dernier numéro de mars 2002,
l’hebdo brejnevo-chevenementiste leur dédit 31 pages (pub non comprise) pour
presque une centaine d’entre eux.
Les
bons, les brutes ou les truands ?
Ces
politiquement incorrects là « ruent dans les brancards de la
bien-pensance pour le meilleur … et pour le pire ». Autant dire que
l’hebdo fait la différence entre les bons et les mauvais.
Au
palmarès, de véritables fouteurs de merde comme par exemple Michel
Houellebecq, pour avoir dit que l’islam était la plus conne des religions.
C’est sûr que Houellebecq a pris un risque en disant cela,
celui de se faire traiter par Marianne de « romantique déçu qui a tourné
au beauf macho », celui aussi de se prendre une quasi fatwa par le recteur
de la mosquée de Paris quelques jours avant le 11 septembre 2001. L’affaire
s’est calmée depuis jusqu’à ce que ledit Houellebecq se fasse assigner ce
mois de septembre 2002 par 4 associations musulmanes pour « incitation à
la haine ». Pas de doute Michel Houellebecq méritait bien d’être cité.
Dans
la même ligne un autre rebelle qui l’a depuis payé de sa vie : Pim
Fortuyn, « dandy flamboyant, homosexuel affirmé, sociologue, mais
redoutable populiste, raciste et xénophobe ». Trois points positifs pour
trois points négatifs donc, il ne manquait plus à Marianne que de rajouter que
la sodomie rendait les fachos plus cool, enfin de quoi je me mêle ?
Il
y en a d’autres encore que Marianne n’aime pas et a le mérite de reconnaître
comme politiquement incorrects, que ce soient Berlusconi ou Bossi, ces gens qui
« salissent l’ensemble de le classe politique italienne ».
Et
puis, à côté des brutes et des truands, il y a les bons, les biens, les super
politiquement incorrects que Marianne aime, et ceux là ressemblent au chanteur
engagé des Inconnus.
On
y trouve donc l’Alain Lipietz, un gars qui « peut afficher l’orgueil légitime
d’avoir élaboré une conception du monde différente – sinon meilleure –
du modèle dominant », euh modèle ultralibéral bien sûr, non ? Il
y a aussi le Charasse, celui qui fume de la bonne de chez Castro et manie le
contrôle fiscal avec un art consommé, et puis le Gremetz qui fonce dans la
foule au volant de sa voiture, porte un culte à Staline et se fait amnistier
par Chirac. En passant, le seul chauffard volontaire a bénéficier d’une
amnistie taillée sur pièce. Ah et puis l’idole de la rédaction, Jean-Pierre
Chevènement rebaptisé de l’ignominieux « che », le commentaire
est là tout bonnement hagiographique.
On
sort du politique et on continue, on passe à Bernard Bertossa, un Suisse
courageux qui dénonce le blanchiment financier auquel ses vilains compatriotes
banquiers se livrent : à quand la libération de ce ridicule bout
de montagne vendu aux affairistes capitalistes de tous poils ? Marc Blondel
est là aussi, il exploite un peu son chauffeur mais il emmerde le MEDEF, quel
courage !
Faux rebelles
et vrais lèche-culs ?
Joseph
Stiglitz suit, il est présenté comme celui qui « dénonce l’ultralibéralisme
en marche, programmé par les pays occidentaux pour les pays occidentaux ».
Dans la même veine de la résistance à l’air du temps, comme l’aurait dit
Bourdieu, vla l’André Orléan. Teigneux celui-là avec son livre « le
pouvoir de la finance », paraît qu’à lui tout seul il casse toutes les
hypothèses des experts du néolibéralisme et de leur credo qui « réduit
les aspirations des individus à une stricte logique égoïste et consumériste »
(sic). Le rebelle que c’est l’Orléan, pas de doute qu’avec de telles
positions on en voudra plus à la fac, il risque le chômage à dire des trucs
pareils ….
Un
chouchou des talk-show et de mon petit observatoire des sévices publics
revient, le gars de « l’inspection de
classe », Gérard Filoche, ex haut responsable trotskiste et
inspecteur du travail, futur vedette peut être d’une série télé où tel
Zorro il dénoncera les coups bas du patronat (non, non, je déconne pas là).
Il a risqué gros le gros Gérard, Martine Aubry lui a remonté les bretelles,
c’est qu’il doit être drôlement coco ce gars là. Une autre vedette du
site Eurolibertariens, Adolf Chavez, heu non
Hugo. Je passe rapidement sur d’autres bien-pensants comme Ken Livingstone,
Ralph Nader, Pascal Sevran, Philippe Val dont « les coups de gueule contre
le néo-libéralisme font du bien », on
n’évoquera pas ses mises en examen pour pédophilie …Denis Robert, Ignacio
Ramonet de retour d’une sauterie à l’ambassade de Cuba, l’inévitable José
Bové, Régis Debray, le trotskiste Bensaïd. Et
puis des contempteurs du rêve américain, américain eux mêmes comme Noam
Chomsky, Norman Mailer ou Harold Pinter qui dixit Marianne « se refuse à
lécher comme tout le monde le cul de l’Oncle Sam ».
Quelle envolée lyrique, on reconnaît bien là le style guignols de Canal. Mais au fait il en manque encore … Anarcho-capitaliste c’est politiquement incorrect ou …